S’il arrive souvent à Michel
Onfray de se montrer excessif voire agaçant (on se souvient notamment de ses propos sur Rousseau), son ouvrage consacré aux « ultras des
Lumières » a constitué une de mes gourmandises de l’été.
Il m’a permis au passage de redécouvrir
le baron d’Holbach, qu’Onfray qualifie de « héraut de l’athéologie »
et en particulier son « Histoire critique
de Jésus-Christ » (dont je n’avais jamais entendu parler…), une
formidable « machine de guerre antichrétienne ».
Et reconnaissons
qu’à côté de lui, même les audaces anticléricales d’un Voltaire nous
apparaissent soudain bien tièdes !
Rien, absolument rien, n’échappe
au feu nourri déclenché par le fermier général, qui vise pêle-mêle les
différents épisodes de la vie de Jésus-Christ tels qu’ils sont rapportés dans
les Evangiles.
Holbach, par Carmontelle |
Prenons l’exemple de
l’Annonciation, que d’Holbach analyse avec une ironie féroce :
« Un Ange entre chez Marie,
dont l’Epoux était absent. Il la salue, c’est-à-dire, lui fait un compliment
dans la langue du pays, qui traduit suivant le
génie de la nôtre signifie : Bonjour,
ma chère Marie ! Je vous trouve adorable : que d’attraits ! Que
de grâces ! Vous êtes de toutes les femmes la plus belle, à mes yeux. Vos
charmes vous sont garants de ma sincérité. Couronnez donc mes feux. Ne craignez
point les suites de votre complaisance ; votre époux est un sot, à qui par
des visions et des songes on peut faire croire ce qu’on voudra. Le bonhomme
regardera votre grossesse comme l’effet d’un miracle du Très-Haut ; il
adoptera votre Enfant avec joie ; et tout ira le mieux du monde.
Marie, rassurée par ces mots, et peu accoutumée à recevoir de pareils
compliments de son Epoux, lui répondit : Eh bien, je me rends. Je compte sur votre adresse et sur votre
parole : disposez de moi tout comme il vous plaira.
Rien n’est donc plus facile que
de dégager le récit de Saint Luc du merveilleux, qui pourrait embarrasser.
L’événement de la grossesse de Marie rentre dans l’ordre naturel, et si l’on
met un jeune homme à la place d’un Ange, le passage de l’Evangéliste n’aura
plus rien d’incroyable . En effet
bien des gens ont dit que l’Ange Gabriel n’était autre qu’un Amant, qui
profitant de l’absence de Joseph trouva le secret de déclarer et de satisfaire
sa passion.
Nous ne nous arrêterons point à
former des conjectures sur le nom véritable et sur la qualité de l’Amant de
Marie. Les Juifs, dont le témoignage doit paraître suspect en cette occasion,
assurent, comme nous le dirons par la suite, que cet Amant favorisé fut un
Soldat ; (les militaires eurent toujours des droits sur les cœurs des
belles) ils ajoutent que de son commerce avec la femme de Joseph naquit le
Messie des Chrétiens : que l’Epoux mécontent quitta sa femme infidèle pour
se retirer à Babylone, et que Jésus, avec sa mère, passa en Egypte, où il
apprit le métier de Magicien, qu’il vint par la suite exercer dans la Judée. »
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