Directeur de l'université populaire de Caen, Michel Onfray a pour habitude de poser un regard aigu et critique sur les figures les plus marquantes de notre histoire littéraire. En 2012, année du tricentenaire Rousseau, il se montre fidèle à sa réputation de trouble-fête en lançant cette charge féroce contre le philosophe genevois.
Pourtant, comme tant d'autres avant lui, on découvre avec stupeur que si l'enseignant-philosophe-écrivain-chroniqueur (...) a bien lu Rousseau, il lui reste malheureusement à bien le comprendre...
TROIS CENTS ANS
ÇA SUFFIT…
Michel Onfray |
"Tricentenaire de la naissance de Rousseau ! Adolescent, je l’aimais,
mais il faut être adolescent pour aimer le philosophe genevois… Bon signe de
l’aimer à dix sept ans, mauvais de l’aimer plus tard. Car cet homme acariâtre,
atrabilaire, paranoïaque, misanthrope, mégalomane, a couché sur le papier
nombre d’idées qui, reprises par de sinistres personnages, sont devenues depuis
trois siècles des armes de destruction massive de l’humanité.
Saint-Just et Robespierre s’emparent de la justification de la peine de
mort donnée dans Le Contrat Social, de la critique de la propriété
formulée dans le Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les
hommes de la haine de l’athéisme et de l’hédonisme, doublée d’une
célébration de l’idéal ascétique calviniste avec obligation à la vertu
transformée en ciment d’une religion laïque, thèses développées
dans La Profession de foi du vicaire Savoyard. Ainsi armés
conceptuellement, ces dictateurs ont conduit des milliers d’hommes à la
guillotine pour ensanglanter une Révolution française qui s’annonçait pourtant
sous de bons auspices avec l’abolition des privilèges.
Cette Révolution française, via Marx et le marxisme, puis Lénine, fournit
la matrice au socialisme autoritaire de la révolution industrielle. Le marxisme
recycle en effet ce schéma simpliste : l’homme naît bon, la société le
corrompt, changeons de société, nous retrouverons la bonté primitive de
l’homme. Le schéma chrétien dans lequel s’inscrit la pensée rousseauiste
facilite les choses. Pour les Chrétiens : il existe un paradis au
début de l’humanité ; le péché originel en clôt les portes ; mais on
peut les ouvrir à nouveau par la révolution spirituelle d’une conversion ;
alors l’Eden perdu devient promesse d’une vie éternelle. Pour les
marxistes : le paradis, c’est la société d’avant la propriété ; le péché
originel correspond à l’appropriation, à l’enclos des terres, à la
barrière ; le salut passe par l’abolition des clôtures et la
réalisation du communisme des biens ; arrive alors une société sans
classes, sans exploitation, sans domination, sans négativité, sans mal… Les
camps, les barbelés, les exécutions capitales ont montré la dangerosité de ces
rêveries d’un penseur solitaire.(...)"
Dans ce passage, Michel Onfray commet le même contresens (volontaire ?) que les dictateurs qui se réclamaient de Rousseau et qu'il prétend dénoncer. Relisons pour mémoire ce passage du Contrat Social dans lequel le philosophe affirme que "la souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu'elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point... les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires." En somme, s'il proclame (comme d'autres avant lui) la souveraineté du peuple, Rousseau ajoute que cette souveraineté est inaliénable et qu'il appartient au peuple seul de l'exercer ! On l'a compris, toute forme de démocratie représentative est inévitablement condamnée à trahir celui dont elle se revendique.
Robespierre et ses amis révolutionnaires ? Ils trahissent Rousseau en confiant le pouvoir à la Convention.
Lénine ? Ils trahit Rousseau en instaurant une assemblée constituante après la révolution d'octobre.
Staline ? Il trahit Rousseau en imposant un régime oligarchique et en se portant à sa tête.
Faut-il le rappeler à Michel Onfray ? La pensée politique de Rousseau n'est en aucun cas compatible avec l'événement révolutionnaire, et encore moins avec la mise en place d'un régime représentatif. Contrairement à celle de Marx (qui en appelle à la lutte des classes), cette même pensée est davantage critique que constructive. Loin de la caricature qu'en propose Michel Onfray, Rousseau ne croit en aucun cas à un retour en arrière, ni à un renversement du cours de l'histoire et encore moins à un rétablissement de "la bonté primitive de l'homme". Dans son Discours sur l'origine de l'inégalité, il s'interroge avant tout sur l'origine des sociétés, des institutions et des lois pour en conclure ceci : que malgré les apparences, tout ordre politique sert à protéger le petit nombre (appelons-les : riches) du grand nombre (appelons-les : pauvres).
Hostile à ceux qu'il appelait les "séditieux", Rousseau aurait sans nul doute détesté tous les révolutionnaires auxquels Michel Onfray tente malencontreusement de le rattacher...
Dans ce passage, Michel Onfray commet le même contresens (volontaire ?) que les dictateurs qui se réclamaient de Rousseau et qu'il prétend dénoncer. Relisons pour mémoire ce passage du Contrat Social dans lequel le philosophe affirme que "la souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu'elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point... les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires." En somme, s'il proclame (comme d'autres avant lui) la souveraineté du peuple, Rousseau ajoute que cette souveraineté est inaliénable et qu'il appartient au peuple seul de l'exercer ! On l'a compris, toute forme de démocratie représentative est inévitablement condamnée à trahir celui dont elle se revendique.
Robespierre et ses amis révolutionnaires ? Ils trahissent Rousseau en confiant le pouvoir à la Convention.
Lénine ? Ils trahit Rousseau en instaurant une assemblée constituante après la révolution d'octobre.
Staline ? Il trahit Rousseau en imposant un régime oligarchique et en se portant à sa tête.
Faut-il le rappeler à Michel Onfray ? La pensée politique de Rousseau n'est en aucun cas compatible avec l'événement révolutionnaire, et encore moins avec la mise en place d'un régime représentatif. Contrairement à celle de Marx (qui en appelle à la lutte des classes), cette même pensée est davantage critique que constructive. Loin de la caricature qu'en propose Michel Onfray, Rousseau ne croit en aucun cas à un retour en arrière, ni à un renversement du cours de l'histoire et encore moins à un rétablissement de "la bonté primitive de l'homme". Dans son Discours sur l'origine de l'inégalité, il s'interroge avant tout sur l'origine des sociétés, des institutions et des lois pour en conclure ceci : que malgré les apparences, tout ordre politique sert à protéger le petit nombre (appelons-les : riches) du grand nombre (appelons-les : pauvres).
Hostile à ceux qu'il appelait les "séditieux", Rousseau aurait sans nul doute détesté tous les révolutionnaires auxquels Michel Onfray tente malencontreusement de le rattacher...
Michel Onfray |
Onfray n'est pas à une contradiction près. Il tacle régulièrement le robespierrisme de Mélenchon tout en se réclamant du jabobin Chevènement ...allez comprendre !
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