jeudi 31 mars 2011

Critique de "Rousseau, la Comédie des Masques"

Une "postface sensible, inquiète, incertaine..."
Une confidence : j'ai eu ce temps d'écriture en horreur ...

mercredi 30 mars 2011

Liaisons dangereuses, Victoire !



Une scène que je me devais d'insérer un jour dans ce blog.
Tellement délicieuse, tellement cruelle...
Je la dédie à Sophie...

dimanche 27 mars 2011

Rousseau vu par Grimm

Melchior Grimm
Ami de Rousseau lors de ses premières années à Paris, Melchior Grimm va bientôt devenir l'un des ennemis les plus farouches du philosophe genevois. Rappelons que la rupture entre les deux hommes coïncide avec le séjour de Rousseau au château de la Chevrette, auprès de Madame d'Epinay, maîtresse de Grimm.
On a bien souvent prétendu que la fâcherie avec les philosophes était liée à des motifs idéologiques. Pour Grimm du moins, on peut avancer sans aucune crainte de se tromper qu'il s'agit de motifs d'ordre privé qui vont l'amener à haïr Rousseau.
La Correspondance Littéraire qu'il destine à quelques têtes couronnées en Europe nous éclaire sur le regard que porte l'Allemand sur le Genevois.


"Le philosophe Diderot, avec lequel il se lia en ce temps-là, fut le premier à lui dessiller les yeux sur son vrai talent, et l'Académie de Dijon ayant proposé la fameuse question de l'influence des lettres sur les moeurs, M. Rousseau la traita dans un Discours qui fut l'époque de sa réputation et du rôle de singularité qu'il a pris depuis. Jusque-là, il avait été complimenteur, galant et recherché, d'un commerce même mielleux... Tout à coup il prit le manteau de cynique, et n'ayant point de naturel dans le caractère, il se livra à l'autre excès." (1762)


Quel talent, ce Grimm ! En quelques lignes, il discrédite totalement Rousseau, laissant notamment entendre que c'est Diderot qui lui a soufflé l'idée de son "personnage". Depuis, Rousseau aurait donc enfilé un "manteau de cynique" pour jouer le "rôle" d'un nouveau Diogène. Et cela lui aurait valu sa "réputation".


"Rousseau n'a point d'admirateurs, il a des dévots : né avec toutes les qualités d'un chef de secte, il s'est trouvé déplacé dans son siècle, dont l'esprit tend à une association générale de culture et de philosophie, fondée sur une grande indifférence pour toutes opinions particulières... Rousseau aurait joué un grand rôle il y a deux cents ans... dans ce siècle, il meurt oublié en Dauphiné sans avoir produit un effet mémorable." (1770)

On retrouve là le leitmotiv des encyclopédistes dans les années 1765-1778 : Rousseau est fou, mais s'il avait accepté d'intégrer la secte des philosophes, on aurait pu en faire quelque chose. Depuis que j'ai entamé l'écriture du 2è tome, je prends plaisir à imaginer la peur de Melchior Grimm (et d'autres...) lorsqu'il apprit que Rousseau allait publier ses mémoires. L'effort concerté de plusieurs philosophes pour convaincre le public de l'insignifiance de Rousseau vient conforter mes intuitions


En 1778, lorsque Rousseau meurt, Grimm poursuit le pilonnage entrepris depuis plus de dix ans, et il accrédite la thèse selon laquelle Rousseau se serait donné la mort. Jusqu'au bout donc, sans jamais manifester la moindre empathie, Grimm aura mené un incessant travail de sape destiné à discréditer non seulement le Genevois, mais surtout son oeuvre.
Mais qu'avaient-ils donc tous à craindre des révélations de Jean-Jacques ? Excellente question qui ouvre bien des perspectives au romancier...
Correspondance littéraire



jeudi 24 mars 2011

Rousseau vu par Voltaire

On ne dira jamais assez quel rôle a joué Voltaire dans les persécutions subies par Rousseau tout au long de son existence. Et il y aurait encore bien davantage à dire sur cette haine presque palpable qui anime le patriarche de Ferney dès que le nom de Rousseau est évoqué devant lui.
En parcourant son immense correspondance, je ne l'ai d'ailleurs jamais senti aussi malveillant et venimeux que lorsqu'il aborde le cas Rousseau.

Voltaire

"Le singe ingrat... On le regarde comme un fou ou comme un monstre" ( lettre à Damilaville"), "un petit séditieux... qui mériterait au moins le pilori" (lettre à Damilaville), "il faut couper un membre gangrené" (lettre à Marmontel) ; "un petit homme né dans la fange, pétri de tout l'orgueil de la sottise, de toute l'avarice attachée à son éducation, de toute l'ignorance de son école" ( les Adorateurs)


On perçoit de temps à autre les raisons de ce ressentiment :
"Il aurait eu peut-être un talent tout entier s'il avait été honnête
( lettre à Mme d'Epinay) , "cet archi-fou, qui aurait pu être quelque chose, s'il s'était laissé conduire" (lettre à d'Alembert), "s'il avait voulu que nous nous entendissions, nous aurions fait une révolution dans la manière de penser".
Le voilà, le Voltaire qu'on méconnait encore : il se rêve en chef de clan et voit dans les autres philosophes des séides exécutant ses volontés.
A mon sens, il entre également dans cette prévention contre le Genevois une part de jalousie, celle du penseur qui se découvre soudain face à un philosophe d'envergure... Mais Voltaire ne s'en tient pas à ces gesticulations épistolaires. En 1765, avec son pamphlet "le Sentiment des Citoyens", il en arrive à proférer les pires des bassesses : "Nous avouons avec douleur et en rougissant que c'est (Rousseau) un homme qui porte encore les marques funestes de ses débauches, et qui, déguisé en saltmbanque, traîne avec lui de village en village, et de montagne en montagne, la malheureuse dont il fit mourir la mère, et dont il a exposé les enfants à la porte d'un hôpital..." Il conclut l'ouvrage par un appel pressant aux autorités genevoises : "il faut lui apprendre que si on châtie légèrement un romancier impie, on punit capitalement un vil séditieux."
Une peine capitale, voilà ce que réclame Voltaire pour son frère ennemi. Voilà l'homme qu'on considère habituellement comme l'un des grands humanistes du siècle des Lumières... Je vous laisse libre d'en juger.

mercredi 23 mars 2011

Rousseau vu par Charles Maurras

Journaliste rattaché au mouvement nationaliste Action Française, Charles Maurras propose en 1942 un portrait édifiant de Rousseau. En voici quelques extraits...


"Ce que je voulais ainsi montrer dans Rousseau, c'était le cas-type de l'insurgé contre toutes les hiérarchies, le cas essentiel de l'individualisme anarchique."
Volontaire ou non, on trouve là le même contresens que chez d'Ormesson, qui fait lui aussi de Rousseau un séditieux et un anarchiste.
Charles Maurras


"En vérité, au degré où voilà le pays déchu, ce n'est pas le moment de ramener qui que ce soit à l'école de Rousseau ni de réhabiliter celui-ci (...) Comment des hommes de moeurs irréprochables et même sévères et pures peuvent-ils honorer l'auteur d'un livre comme les Confessions ? Un personnage comme le héros des Confessions ? (...) Il m'a toujours donné un malaise affreux"
Apôtre de la morale dans un pays vaincu par ses vices autant que par l'ennemi, Maurras joue parfaitement son rôle de Père la vertu. Les instituteurs et les professeurs ne sauraient faire lire un tel ouvrage aux jeunes Français !


"Ce n'est pas la faute du bien s'il est le contraire du mal, et si pourtant un homme qui est ivre ou fou d'optimisme et de philanthropie devient, au premier heurt de la nature ou de la société - du Réel - un misanthrope atrabilaire."
Rousseau, fou d'optimisme ? Voilà qui est surprenant de la part d'un homme qui déclare qu'il n'y a "plus de remède" à la situation politique et sociale en France, "à moins de quelque grande révolution presque aussi à craindre que le mal qu'elle pourrait guérir". La conscience de Rousseau, bien loin d'être optimiste, apparaît au contraire lucide et tragique.


"L'immense majorité de la France catholique du XVIIIème siècle voyait dans sa doctrine ce que les théologiens appellent le Déisme : une immense diminution de leur foi..."
Admettons le déisme de Rousseau, c'est-à-dire le désir de pratiquer une religion naturelle, loin de l'Eglise, sans avoir recours à aucun intermédiaire. Il est pourtant difficile, comme le fait Maurras, de comparer dans ce domaine Rousseau à Diderot et pire encore, à d'Holbach. Car n'oublions pas que la Foi de Rousseau (ou plutôt son retour dans l'Eglise) fut justement l'une des raisons de sa rupture avec les philosophes ! N'est-ce pas lui, d'ailleurs, qui qualifie ainsi  l'Evangile (dans sa Réponse au Roi de Pologne) : "ce divin livre, le seul nécessaire à un chrétien, et le plus utile de tous à quiconque même ne le serait pas..." ?

lundi 21 mars 2011

Rousseau vu par Jean d'Ormesson...

J'ai sous les yeux un petit ouvrage de Jean d'Ormesson dans lequel l'"immortel" propose une approche très académique (justement !) de Rousseau et de son oeuvre.
Mis à part le titre ("un Candide enragé"), on ne retiendra pas grand-chose de cet amas de poncifs, d'approximations, voire de contre-vérités indignes d'un écrivain de ce rang.
Jean d'Ormesson

En parlant de Rousseau, d'Ormesson affirme : "Il appartient tout entier à une société dont il combat les excès et les injustices - mais seulement les excès et les injustices. Il aime le luxe, l'argent, la vie facile, le plaisir".
Je préfère penser que l'académicien confond ici Rousseau et Voltaire. Rousseau aimerait "l'argent" et "la vie facile", lui qui renonce à deux pensions royales, lui qui reprend son métier de copiste à quelques sous la page, lui qui finit sa vie aussi pauvre qu'il l'avait commencée ? Il combat "seulement les excès" et les "injustices" ? Allons donc ! Jamais Rousseau n'a pris part à aucune affaire judiciaire, jamais il ne s'est impliqué dans aucun procès personnel. Il ne prend parti ni pour Calas, ni pour Sirven, ni pour La Barre. On le lui a bien assez reproché, d'ailleurs ! Contrairement à celle de Voltaire, la pensée du Genevois dénonce les fondements de la société d'ancien régime, et non ses "excès", comme le prétend d'Ormesson.


Plus loin, il affirme à propos de Rousseau qu'" il veut nous faire revenir à l'état de nature". Et d'Ormesson de s'étonner "qu'un libertaire à la limite de l'anarchisme finisse par édifier, dans le Contrat Social, une société à la limite du totalitarisme." Enfin, l'académicien lâche le mot qu'on attendait, celui de "révolutionnaire".
Passe encore qu'il reprenne ici, en la paraphrasant, la célèbre formule de Voltaire : "ne tentez donc pas de retomber à quatre pattes", écrit-il à Rousseau en 1755. Mais de là à faire de Rousseau un anarchiste révolutionnaire ! On retrouve là le discours des ennemis de Rousseau, de Diderot à Grimm, ceux-là même qui tentent de le discréditer aux yeux de l'opinion en caricaturant ses propos. Car Roussseau n'a jamais encouragé la sédition ni le moindre mouvement de révolte. Lisons-le : "gardons-nous d'en conclure qu'il faille brûler toutes les bibliothèques et détruire les universités et les académies. Nous ne ferions que replonger l'Europe dans la barbarie, et les moeurs n'y gagneraient rien... on n'a jamais vu de peuple, une fois corrompu, revenir à la vertu. En vain vous prétendriez détruire les sources du mal... en vain même vous ramèneriez les hommes à cette première égalité, conservatrice de l'innocence et source de toute vertu : leurs coeurs une fois gâtés le seront toujours ; il n'y a plus de remède, à moins de quelque grande révolution presque aussi à craindre que le mal qu'elle pourrait guérir, et qu'il est blâmable de désirer et impossible à prévoir." (réponse au roi de Pologne)
En quelques lignes, Rousseau contredit l'analyse fallacieuse de Jean d'Ormesson. Ni révolutionnaire, ni anarchiste, ni partisan d'un retour en arrière, mais lucide et presque résigné quant au sort des Français. Il n'est pas étonnant après cela que Rousseau se soit surtout intéressé aux institutions de petits états comme la Corse ou la Pologne, car à ses yeux, seuls ces derniers pouvaient encore être réformés.  
Pour la France, hélas, il était déjà trop tard...

jeudi 17 mars 2011

Radio France Berry

Interview demain sur Radio France Berry.
 Il faudra être ponctuel, entre 14h40 et 14h47 !
 A bientôt

mercredi 16 mars 2011

Recueil de bons mots du XVIIIème siècle...

Comme le montre admirablement Ridicule, le film de Patrice Leconte, le sens de la répartie joue un rôle capital dans les salons des Lumières. Certains s'y exercent et le cultivent (comme le personnage incarné par Jean Rochefort) ; pour d'autres, il est presque naturel...
Par ces quelques bons mots, glanés çà et là, j'aimerais rendre hommage au bel esprit...

Un souper fin...



L'actrice Sophie Arnoult disait, en parlant de sa franchise, qu'elle avait le coeur sur les lèvres.
- Je ne suis pas surpris, lui répondit Champcenetz, que vous ayez l'haleine si perfide.
         
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- Mes vers me coûtent peu, se vantait un mauvais poète.
- Ils vous coûtent ce qu'ils valent, lui répondit-on.


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Monsieur de Richelieu demandait à Casanova laquelle des deux actrices il préférait.
- Celle-là.
- Elle a de vilaines jambes !
- On ne les voit pas, Monsieur, et après, dans l'examen de la beauté d'une femme, la première chose que j'écarte sont les jambes...


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Monsieur de Charolais ayant surpris Monsieur de Brissac chez sa maîtresse, lui ordonna :
- Sortez !
L'autre lui répondit :
- Monsieur, vos ancêtres auraient dit : sortons !


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Fontenelle dit un jour à un discoureur ennuyeux :
- Tout cela est très vrai, Monsieur ; très vrai, je l'avais même entendu dire à d'autres.


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Voyant Madame de Pompadour se promener au bras du Maréchal de Saxe, chef d'armée de Louis XV, quelqu'un dit :
- Voilà l'épée du roi et son fourreau.


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Une femme de quarante ans répétait sans cesse qu'elle n'en avait que vingt-cinq.
- Je le sais bien, lui répondit un homme, car il y a quinze ans que vous me le dites...

Salon de Madame Geoffrin

lundi 14 mars 2011

Critique...

Je rapporte ci-dessous cette critique de Pierre Molina, en rappelant au passage que "la Comédie des Masques" est peut-être un roman historique, mais en aucun cas une biographie...



"On avait lu avec plaisir en 2009-2010 la biographie romancée de Sophie CHAUVEAU "Diderot – Le génie débraillé".
 Une frustration en était alors ressortie alimentée par le peu d'information (au-delà de ce que l'on savait déjà) sur l'image du personnage austère et déplaisant de Jean Jacques Rousseau qu'a bien voulu nous laisser l'Histoire.
Sophie Chauveau en était alors toute excusée puisque son roman se concentrait sur Denis Diderot et non sur la personne qui nous intéresse aujourd'hui.
Bref, le roman d'Olivier Marchal vient en quelque sorte, ici, compléter ce manque.



"A la manière de" Sophie Chauveau, Olivier Marchal se focalise sur le personnage de Jean Jacques Rousseau et non sur son œuvre. On ressort alors de ce livre avec l'envie évidente de se lancer dans la Nouvelle Héloïse mais hélas un peu déconcerté par le peu de connaissances emmagasinées tout au long de cette lecture (au demeurant très intéressante) sur les théories philosophiques de l'écrivain.

Monsieur Marchal aura donc la même remarque que Madame Chauveau, à savoir qu'à nos yeux ces personnages verraient leurs biographies avantagées à être à minima enrichies par une approche (même vulgarisée) de leur œuvre littéraire.
C'est donc un regret et non un reproche que nous formulons ici, tout en soulignant que la lecture de ce roman reste un vrai plaisir que nous recommandons vivement.



Car enfin, la première qualité de cette biographie est de nous restituer un portrait dépoussiéré du génie des Lumières. Alors bien sur, le personnage reste froid, paranoïaque, souvent désagréable avec son entourage. Mais Olivier Marchal en explique les raisons, celle d'une société artificielle où le paraitre gagne chaque jour un peu plus sur le fond, où l'hypocrisie cannibalise les liens sociaux.

Rousseau rejette cette société qui saura lui faire payer.
En humanisant le personnage de Jean Jacques Rousseau, Olivier Marchal redonne à ce génie une image attachante et peut-être plus proche d'une réalité encore aujourd'hui mal connue…



Bonne lecture

Pierre MOLINA"

vendredi 11 mars 2011

La maladie de Rousseau

sonde
On ne tentera pas ici de définir la nature du mal (de ce "vice de conformation", disent les Confessions) qui a marqué l'existence de Rousseau et entraîné tant de spéculations chez les cliniciens. De quoi s'agissait-il ? Peut-être d'une malformation de l'urètre qui provoquait chez lui une rétention urinaire. Rousseau lui-même s'en est souvent ouvert dans ses écrits : "mes rétentions ne sont point par accès comme celles de ceux qui ont la pierre, qui urinent à plein canal et tantôt n'urinent point du tout. Mon mal est un état habituel. Je n'urine jamais à plein canal et jamais aussi l'urine n'est totalement supprimée..." Dans les Confessions, il précise qu'il a dû faire d'"immenses provisions de sondes" destinées à le soulager plus aisément.

Ce qui nous interroge davantage, c'est la place que prend la maladie dans l'oeuvre de Rousseau. En effet, contrairement à bon nombre de malades, le Genevois ne cesse de décrire l'étendue de son mal ainsi que ses symptômes.

Par exemple, s'il refuse de se présenter devant le roi à Fontainebleau (lors de la représentation du Devin du Village), c'est parce qu'il craint le "fréquent besoin de sortir" pour se soulager. Il ajoute un peu plus bas que "cette infirmité (le) tenait écarté des cercles" parisiens. Par cet aveu, Rousseau réfute ceux qui le soupçonnent de jouer un rôle, celui d'un Diogène du XVIIIème. Que prétendent ils, ces anciens amis ? Qu'il a refusé la pension royale pour faire parler de lui. Qu'en société, il joue le personnage du cynique pour se singulariser. Non, répond Rousseau, c'est ma maladie qui explique mon comportement ! Il fait donc de ce mal (réel ou supposé) un allié incontestable : "cette maladie est connue de Messieurs Malouin, Morand, Thyerri, Daran, le frère Côme." Les témoins sont cités à la barre et sommés de confirmer ses dires !

En tenue d'Arménien (pour cacher les sondes ?)
La maladie apporte également un démenti à ses accusateurs, notamment Voltaire qui évoque dans un célèbre pamphlet les "marques funeste de ses débauches". Rousseau serait donc un débauché, un syphilitique "pourri de vérole" ! 
Cette accusation fait mouche. En décrivant sa maladie dans les détails, Jean-Jacques cherche à donner des gages de sa sincérité. Rien ne le hante tant que l'idée de ne pas être cru. Et s'il va aussi loin dans l'indécence, c'est certainement pour persuader son lecteur qu'il ne cache rien. Comment pourrait-on soupçonner de mensonge un homme qui avoue pratiquer la masturbation, qui relate ses échecs pitoyables auprès des femmes, son goût pour l'exhibitionnisme et son plaisir de la fessée ? Puisqu'il fait ces aveux, on peut sans nul doute avoir foi dans la pureté de ses intentions et dans son honnêteté intellectuelle.

Je finirai par le constat dressé par les médecins qui ont autopsié Rousseau en 1778, et qui ont disséqué son arbre urinaire : "nous n'avons pu trouver ni dans les reins, ni dans la vessie, les uretères et l'urètre, non plus que dans les organes et canaux séminifères, aucune partie, aucun point qui fût maladif ou contre-nature."

Vous comprendrez pourquoi la question de la maladie de Rousseau a autant déchaîné les passions...

mercredi 9 mars 2011

JJ Rousseau, une biographie... (2)


1762-1764
Rousseau rédige ses Lettres à Malesherbes, prélude à ses Confessions.
Malesherbes
Malgré les risques encourus, il refuse que son nom soit supprimé en tête du Contrat Social. Malesherbes refuse l'entrée du livre en France. L'Émile est en vente. Le livre est dénoncé à la Sorbonne, puis condamné au feu. Rousseau est décrété de prise de corps. Il s'enfuit en Suisse.
À Genève, l'Émile et le Contrat Social sont condamnés parce qu'ils contiennent des « maximes dangereuses, et par rapport à la religion, et par rapport au gouvernement. » Rousseau est décrété de prise de corps.
Il s'installe à Môtiers, en territoire neufchâtelois, gouverné par George Keith.
Rousseau accuse Voltaire de comploter contre lui à Genève.
Il refuse une pension de Frédéric II.
La Lettre à Christophe de Beaumont est achevée. Après l'Émile, Rousseau y fait une nouvelle fois l'apologie de la religion naturelle. Elle paraît à Genève, où le Petit Conseil l'interdit. L'ouvrage circule déjà à Paris.
Ulcéré par l'absence de réaction des Genevois, Rousseau renonce à son titre de citoyen.
Il rédige les Lettres écrites de la Montagne en réponse aux Lettres de la campagne de Tronchin, procureur général du Petit Conseil genevois. Dans cet ouvrage, Rousseau critique l'oligarchie genevoise.
Parution à Genève d'un pamphlet contre Rousseau, écrit par Voltaire. On y apprend que Rousseau a abandonné ses enfants. Il décide d'écrire les Confessions.
Parution des Lettres écrites de la Montagne. Troubles politiques à Genève. Le livre circule à Paris.

1765
Troubles politiques à Genève, où Voltaire incite le Petit Conseil à sévir contre les Lettres écrites de la montagne. L'ouvrage est condamné à La Haye, Neufchâtel, attaqué à Genève, et brûlé à Paris.
On conseille à Rousseau de quitter le pays. Frédéric II rappelle au Conseil d'État que Rousseau est sous sa protection. Des pierres sont jetées contre sa maison. Il est menacé par les paysans de Môtiers. Rousseau prend la fuite et s'installe sur l'île de Saint-Pierre. Il travaille à un projet de constitution pour la Corse.
Madame de Verdellin informe Rousseau de l'hospitalité que lui offre le philosophe Hume en Angleterre.
Le Conseil de Berne ordonne l'expulsion de Rousseau. Ce dernier décide d'accepter la proposition de Hume. Il gagne Paris, où l'attend le philosophe. Il loge durant deux semaines chez le duc de Conti, où il reçoit de nombreuses visites. Parution à Paris d'une pseudo-lettre du roi de Prusse, dans laquelle Rousseau est raillé.

1766
David Hume
Il débarque à Douvres en compagnie de Hume, qui évoque l'éventualité d'une pension du roi d'Angleterre. Rousseau s'installe quelque temps à Londres. Il s'interroge : peut-il accepter la pension, après avoir refusé celle du roi de Prusse ?
Rousseau soupçonne Hume de comploter contre lui. Il emménage à Wooton, dans le Staffordshire, chez Richard Davenport.
Il découvre que Hume est en relation avec ses ennemis parisiens. Comprenant qu'elle porterait préjudice à sa réputation d'auteur « indépendant », Rousseau renonce provisoirement à la pension du roi d'Angleterre. Hume se plaint de son comportement. Rousseau est convaincu qu'il s'est ligué avec d'Alembert et Voltaire pour le perdre.
Après lui avoir formulé ses griefs, Rousseau rompt toute correspondance avec Hume.
Hume correspond avec ses amis parisiens au sujet de Rousseau. Il publie un Exposé sur leur querelle. De Paris à Genève, tout le monde se passionne désormais pour cette affaire.
Rousseau a achevé les six premiers livres des Confessions.
Voltaire accable Rousseau dans sa Lettre de M. Voltaire à M. Hume. Il donne à Paris le signal de l'hallali contre Rousseau, désormais considéré comme fou.
La plupart des amis et protecteurs de Rousseau lui tournent le dos.

1767
Se sentant persécuté, Rousseau quitte Wooton. Il accepte la pension royale et embarque pour la France.
Il habite à Fleury, près de Meudon, chez le marquis de Mirabeau. Conti le prie de s'installer dans son château de Trie, dans l'Oise. Rousseau devra cependant changer de nom. Rousseau emménage à Trie-le-Château, sous le nom de Renou.
Rousseau se sent à nouveau harcelé, notamment par les domestiques du château. Il supplie Conti de l'autoriser à quitter Trie.

1768
Rousseau touche les premiers quartiers de la pension accordée par le roi d'Angleterre.
Il informe Conti de son intention de retourner à Paris.
Il quitte Trie, séjourne à Lyon, à Grenoble, et enfin à Bourgoin, où il épouse Thérèse.

1769-1770
Malade, il emménage à Monquin, dans une ferme appartenant au marquis de Césarges.
Il s'intéresse désormais à la botanique.
Rousseau achève les Confessions. Il reprend son vrai nom.
Manuscrit du dictionnaire de musique
Il revient à Paris en mai 1770 et s'installe à l'Hôtel du Saint-Esprit, rue plâtrière.
Il reprend son métier de copiste.
On lui confirme que plus personne ne parle de Rousseau à Paris.
Il lit les Confessions chez le marquis de Pezay, puis chez Dorat.

1771-1773
Nouvelles lectures publiques des Confessions. Madame d'Épinay rencontre le lieutenant de police Sartine et le prie de faire interdire ces lectures.
Rousseau refuse de toucher d'autres quartiers de sa pension du roi d'Angleterre.
Il fréquente Bernardin de Saint-Pierre.
Il rédige Rousseau, juge de Jean-Jacques.

1774-1776
Rousseau tente de déposer le manuscrit de Rousseau, juge de Jean-Jacques sur l'autel de Notre-Dame. Comme il trouve la grille du choeur fermée, il imagine qu'un complot universel s'est tramé contre lui.
Il rédige son billet circulaire À tout Français aimant encore la justice et la vérité. Il en adresse une copie à Madame Dupin.
Mort du prince de Conti, ce qui décide peut-être Rousseau à entreprendre l'écriture des Rêveries.

1777-1778
Il achève l'écriture des Rêveries.
Rousseau emménage à Ermenonville, chez le marquis de Girardin.
Pris d'un malaise, il meurt le 2 juillet 1778. L'autopsie conclut à une apoplexie séreuse.
Rousseau est inhumé à Ermenonville, sur l'île des Peupliers.
l'île des peupliers
En octobre 1794, la Convention transfère ses restes au Panthéon.

lundi 7 mars 2011

JJ Rousseau, une biographie... (1)


1712
Naissance à Genève le 28 juin de Jean-Jacques Rousseau, dans une famille protestante, d'Isaac Rousseau et de Suzanne Bernard, tous deux citoyens genevois.
Mort de sa mère le 7 juillet.
Jean-Jacques est élevé par sa tante, Suzanne Rousseau, et par sa mie Jacqueline.

1722
À la suite d'une querelle, Isaac Rousseau est contraint de s'enfuir à Nyon. Il laisse Jean-Jacques à son beau-frère, Gabriel Bernard. L'enfant est mis en pension à Bossey, chez le pasteur Lambercier.

1724-1725
Revenu à Genève, Jean-Jacques vit avec son cousin chez son oncle, Gabriel Bernard. Il suit un stage chez un greffier, puis entre en apprentissage chez le graveur Ducommun.

1728
De retour d'une excursion à la campagne, Jean-Jacques trouve les portes de la ville fermées. Il décide de partir à l'aventure.
Mme de Warens
Il est recueilli à Annecy par Madame de Warens, jeune veuve convertie au catholicisme. Elle lui conseille de se rendre à Turin, pour se convertir à son tour.
Jean-Jacques part à pied et après un voyage de quelques jours, il entre à l'hospice des catéchumènes, où il abjure le protestantisme et reçoit le baptême catholique.
Jean-Jacques

1729-1730
Il entre comme domestique au service de Madame de Vercellis, puis chez le Comte de Gouvon.
Il quitte Turin et repart à l'aventure, de Lyon à Fribourg, avant de donner des leçons de chant à Lausanne.

1731-1739
Rousseau découvre Paris, où il espère retrouver Madame de Warens. Puis il gagne Chambéry où habite désormais sa protectrice. Celle-ci lui trouve un emploi au cadastre de Savoie, et Jean-Jacques entreprend ensuite d'enseigner la musique à quelques demoiselles fortunées.
C'est à cette époque (1732) que Madame de Warens lui aurait proposé de goûter le « plaisir » des sens. Jean-Jacques s'exécute, ayant selon ses dires l'impression de commettre un « inceste ».
Tous deux s'installent dans la ferme Revil, aux Charmettes. Rousseau s'initie aux sciences, à la géométrie, l'histoire, la géographie et l'astronomie. Il s'essaie à une comédie en un acte, Narcisse.

1740-1741
Rousseau part pour Lyon, où il devient précepteur des enfants de Monsieur Mably, prévôt général du Lyonnais.

1742
Après avoir conçu un nouveau système de notation musicale, Rousseau se rend à Paris et le présente à l'Académie des sciences.
Il fait la connaissance de Réaumur, de Fontenelle, de Marivaux et de Diderot.

1743
Rousseau est introduit dans certains salons parisiens, notamment celui de Louise Dupin, à qui il aurait adressé une déclaration enflammée. Durant quelques semaines, il devient le précepteur de son beau-fils.
Il se met à composer son opéra des Muses Galantes.
Il part pour Venise où il devient secrétaire de l'ambassadeur de France, le comte de Montaigu.
Louise Dupin

1744
Rousseau se querelle avec le comte de Montaigu à propos d'un dîner offert au duc de Modène, auquel il prétendait assister.
Fin juillet, l'ambassadeur le renvoie et Rousseau rentre à Paris.
Introduit chez le fermier général La Pouplinière, il fait connaissance avec la future Madame de Pompadour.

1745-1747
Rousseau continue de travailler sur son opéra. Il loge à l'Hôtel Saint-Quentin où il fait la connaissance de Thérèse Levasseur, jeune lingère de 9 ans sa cadette. Les Muses Galantes sont jouées chez La Pouplinière, puis chez l'Intendant des Menus Plaisirs. Rameau critique sévèrement la pièce.
Rousseau entre comme secrétaire chez Madame Dupin.
Il tente en vain de faire jouer sa comédie Narcisse aux Italiens.
Naissance probable d'un enfant durant l'hiver 1746-1747. Il est placé aux Enfants-Trouvés.
Rousseau fait la connaissance de Madame d'Épinay, puis de d'Alembert.
Il s'installe à l'Hôtel du Saint-Esprit, rue plâtrière, près de l'hôtel des Dupin.
Il compose l'Engagement téméraire, comédie en trois actes.
Naissance possible d'un deuxième enfant, fin 1747, placé aux Enfants-Trouvés.

1748-1749
Rousseau rencontre Mademoiselle de Bellegarde, future Madame d'Houdetot. Il fait la connaissance de Friedrich-Melchior Grimm et du baron d'Holbach.
Il rédige les articles de l'Encyclopédie consacrés à la musique.
Prison de Vincennes
Il rend visite à Diderot, alors incarcéré à Vincennes pour sa Lettre sur les Aveugles. À cette occasion, il prend connaissance de la question proposée par l'Académie de Dijon pour son prix annuel : si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les moeurs.
Fin 1749, Diderot est libéré.
Naissance possible d'un troisième enfant, placé aux Enfants-Trouvés.

1750
Pour la première fois, Rousseau signe l'un de ses courriers « JJ Rousseau Citoyen de Genève. »
Il se met en ménage avec Thérèse et tous deux s'installent à l'Hôtel du Languedoc, rue de Grenelle.
L'Académie de Dijon donne le premier prix au Discours sur les Sciences et les Arts de Rousseau.

1751
Le Discours sort chez le libraire Pissot, et remporte un succès considérable.
Rousseau décide de quitter le service de Madame Dupin. Il entreprend sa « réforme » personnelle et exerce désormais le métier de copiste de musique, à quelques sous la page.
Naissance possible d'un quatrième enfant, placé aux Enfants-Trouvés.
Premières passes d'armes autour du Discours, dont le propos est vivement contesté.

1752
À l'occasion d'un séjour à Passy, Rousseau compose une grande partie de l'opéra le Devin du Village.
Il devient pour un temps caissier de Dupin de Francueil, beau-fils de Madame Dupin.
Son opéra-comique est donné à Fontainebleau, en présence du roi et de Madame de Pompadour. Il renonce à paraître à l'audience du Roi, qui lui aurait proposé une pension. Diderot lui adresse de vifs reproches à ce sujet.
La comédie Narcisse est donnée au Théâtre Français. Estimant la pièce mauvaise, Rousseau s'en avoue publiquement l'auteur lors d'une apparition au Procope.
Naissance possible d'un cinquième enfant, placé aux Enfants-Trouvés.

1753
On joue le Devin du Village à l'Opéra.
Rousseau publie sa Lettre sur la Musique Française, dans laquelle il prend le parti de la musique italienne. Les musiciens de l'Opéra le pendent en effigie.
L'Académie de Dijon propose un nouveau sujet de concours : quelle est la source de l'inégalité parmi les hommes et si elle est autorisée par la loi naturelle.

1754
Au cours d'un dîner chez d'Holbach, le curé de Mont-Chauvet lit sa tragédie David et Bethsabée, sous les quolibets des autres invités. Rousseau se fâche et quitte la maison. Chez Mademoiselle Quinault,  il menace de sortir si l'on continue de blasphémer.
Il quitte Paris pour Genève, où il réintègre l'église calviniste et recouvre sa qualité de citoyen genevois.
À la fin de l'année, il regagne pourtant Paris.

1755
Le Discours sur l'origine de l'inégalité est publié en Hollande, chez le libraire Rey.
Directeur de la Librairie, Malesherbes autorise l'entrée du Discours en France.
Rousseau prétend vouloir emménager à Genève, où il pourrait consulter le docteur Tronchin au sujet de ses maux.
Première passe d'armes avec Voltaire au sujet du Discours sur l'inégalité.

1756
Rousseau se plaint de sa santé, mais également des visites d'importuns à son domicile.
Il accepte l'offre de Louise d'Épinay de s'installer à l'ermitage du château de la Chevrette. Il quitte Paris le 9 avril, en compagnie de Thérèse et de sa mère.
Il commence à rédiger la Nouvelle Héloïse, il écrit la Lettre à Voltaire sur la Providence.
Il annonce sa décision de passer l'hiver à l'ermitage, ce qui surprend Madame d'Épinay et certains de ses correspondants parisiens.
Louise d'Epinay


1757
Son carrosse s'étant embourbé, Madame d'Houdetot se présente à l'ermitage afin de se faire prêter des vêtements propres.
Rousseau se querelle avec Diderot en raison d'une réplique qu'il lit dans Le Fils Naturel : « il n'y a que le méchant qui soit seul. » Il reproche à Grimm de lui ôter tous ses amis.
Après le départ de son amant pour l'armée, Madame d'Houdetot rend à nouveau visite à Rousseau. Il tombe amoureux d'elle et se rend régulièrement à Eaubonne pour la retrouver.
Dans un courrier adressé à Sophie d'Houdetot, il jure de ne pas l'avilir, de ne pas être un « séducteur ». Inquiète des bruits qui courent à leur sujet, Sophie lui réclame toutes leurs lettres. Rousseau s'exécute.
Querelle avec Louise d'Épinay : Rousseau lui reproche d'avoir divulgué ses relations avec Sophie d'Houdetot. Ils échangent cinq billets dans la même journée, puis se réconcilient.
Sophie d'Houdetot s'éloigne de Rousseau.
Madame d'Épinay propose à Rousseau de l'accompagner à Genève. Diderot et Sophie d'Houdetot appuient cette demande. Rousseau reproche à Madame d'Épinay d'avoir intrigué auprès de ses proches. Il rompt définitivement avec Grimm.
Louise d'Épinay part pour Genève. Rousseau lui écrit que l'amitié est « éteinte » entre eux. Elle le congédie de l'ermitage.
Diderot rend visite à Rousseau : l'entrevue est amicale ; Rousseau lui révèle sa passion pour Sophie d'Houdetot.
Il quitte l'ermitage et s'installe au Petit-Montlouis, à Montmorency. Il renvoie la mère de Thérèse à Paris.
Sophie d'Houdetot

1758
Rousseau écrit pour la dernière fois à Diderot. Il apprend que ce dernier a trahi le secret de sa passion pour Sophie d'Houdetot. Rousseau demande à Rey d'insérer dans la préface à sa Lettre à d'Alembert sur les spectacles une note évoquant la traîtrise de Diderot.
Malesherbes autorise l'entrée en France de la Lettre à d'Alembert.

1759
Rousseau reçoit la visite du maréchal duc de Luxembourg et accepte de venir s'installer chez lui, au Petit-Château de Montmorency. Rousseau se réjouit de pouvoir nouer avec le maréchal un « commerce d'estime et d'amitié ».Il travaille à l'écriture de l'Émile et prépare la publication de la Nouvelle Héloïse.

1760
Rousseau écrit à Voltaire et lui fait cet aveu : « Je ne vous aime point... »
Il travaille à l'écriture du Contrat Social.
Les premiers exemplaires de la Nouvelle Héloïse circulent à Paris.

1761
Parution de la Nouvelle Héloïse en France, qui connaît un succès immédiat.
Madame de Luxembourg entame des recherches pour retrouver le premier enfant abandonné.
Rousseau se dit malade, « dans un état de souffrances continuelles. »
Il prie Madame de Luxembourg de suspendre ses recherches alors qu'elle espère trouver « incessamment celle qui est l'aînée. »
Retard dans la publication de l'Émile, que Rousseau attribue aux Jésuites.
Une sonde s'étant brisée dans son urètre, Rousseau se croit condamné.

A suivre...

samedi 5 mars 2011

Le peuple de Paris

On estime généralement que, sous le règne de Louis XV et Louis XVI, Paris compte entre 500 et 700 mille habitants. Voyons quelques-uns de ces anonymes qui n'ont pas droit de cité dans l'histoire de France.

vendredi 4 mars 2011

Se promener à Paris au XVIIIème siècle (5)

C'est à Catherine de Médicis qu'on doit les premières plantations (en 1564) de ce qui deviendra le jardin des Tuileries. Le jardin primitif forme un trapèze de 500 mètres sur 300, composé de pièces de gazons, de parterres fleuris et de deux fontaines ornées de statues. Les différents parallélogrammes sont séparés par six allées qui se croisent pour former une espèce de damier.
La pratique croissante de la promenade va amener le jardinier Mollet à repenser les dimensions des allées : ainsi, pour une allée de 80 mètres de long, il estime qu'il faut respecter une largeur de 7 mètres ; pour une allée de 500 mètres, la largeur sera de 10 mètres. Le plan des travaux est arrêté par Le Nôtre en 1664. Dès l'année suivante, le jardin est relié au palais par une esplanade et quelques marches. Deux terrasses sont aménagées, l'une au nord et l'autre au sud, le long de la Seine. Deux portes permettent d'accéder au jardin, surveillées par des portiers. Ceux-ci sont chargés de refouler les personnes de basse condition. Une ordonnance de 1696 rappelle d'ailleurs que "sa Majesté a de nouveau très expressément défendu...a tous les laquais et autres gens de livrée d'entrer dans lesdits jardins".
La Grande Allée centrale sera la réalisation la plus importante de Le Nôtre : une avenue de 300 mètres de long, plantée d'arbres, allant du bassin octogonal jusqu'au bassin ouest du palais. Les contre-allées sont moins larges, ce qui concentre les promeneurs dans l'allée axiale, qui offre un point de vue sur le palais et la campagne. A la fin du siècle, la baronne d'Oberkirch constate que les Parisiens "ont adopté" cette allée et "ne mettent pas les pieds dans les autres. On y étouffe, on s'y battrait presque." On estime qu'environ un millier de personnes pouvait s'y réunir.
Espace clos réservé à la haute société, la promenade est également pourvue de plus de 150 bancs, destinés à se reposer mais également à regarder passer les piétons...
Dans les Caractères, La Bruyère raille d'ailleurs le rituel qui voit la belle société se rassembler à heure fixe : "L'on se donne à Paris, sans se parler, comme un rendez-vous public, mais fort exact, tous les soirs, au Cours ou aux Tuileries, pour se regarder au visage et se désapprouver les uns les autres."

jeudi 3 mars 2011

Se promener à Paris au XVIIIème siècle (4)

Désignées autrefois comme les "advenues des Tuileries", les allées qui prolongent le jardin des Tuileries ne deviennent les "Champs-Elysées" qu'en 1709. Contrairement au Cours-la-Reine tout proche, fermé de deux grilles, les Champs-Elysées apparaissent avant tout comme une voie de circulation permettant de relier Paris à Versailles. Dès le XVIIème siècle, à l'initiative de Le Nôtre, on décide de planter d'arbres la partie à l'ouest des Tuileries, et ce jusqu'aux collines de Chaillot.
Ce nouveau lieu de promenade présente un triple avantage : il est ouvert sur la ville (contrairement au Cours-la-Reine), il est utilisé comme voie de communication, il est ouvert à tous (contrairement aux Tuileries). Dès 1719, un arrêt qualifie les Champs-Elysées de "promenade". Les plantations sont constituées de longues allées avec, çà et là, des carrés engazonnés qui permettent aux promeneurs de profiter du soleil tout en s'exposant aux regards.
En 1771, le transfert de la foire St Ovide de la place Vendôme à la place Louis XV va renforcer l'intérêt des Parisiens pour cette promenade toute proche. A tel point que dans son Tableau de Paris, Mercier se résigne à ce constat : "le magnifique jardin des Tuileries est abandonné aujourd'hui pour les allées des Champs-Elysées".
A partir de 1760, un garde suisse nommé Bernard Borde obtient la charge de la location des chaises sur la promenade.
Comme se font entendre de nombreuses plaintes contre la poussière élevée par le passage des voitures, le comte d'Affry (colonel des gardes suisses) propose que la compagnie qui arrose les boulevards prenne également en charge la promenade des Champs-Elysées. Désormais, pendant la période estivale, on arrosera donc toute la zone comprise entre la place Louis XV et le rond point.
Après 1775, l'espace planté entre les allées est définitivement réservé aux piétons (comme sur le boulevards), alors que les voitures doivent emprunter l'allée centrale. Dans le dernier quart du siècle, l'administration royale devra mener un difficile combat contre les spéculateurs et les propriétaires, tous décidés à s'installer à proximité des Champs-Elysées ou du moins à ouvrir l'arrière de leur propriété sur la promenade.
Au moment de la Révolution, le comte d'Angiviller ( en charge de cette promenade) n'est pas peu fier d'avoir résisté aux diverses opérations de spéculation. Il constate même que cette promenade est "fréquentée par tous les ordres" et plus particulièrement par "la moyenne bourgeoisie, parce qu'elle y trouve pour ses enfants dans les jours de fête, l'espace le plus vaste, le plus aéré, le plus sain... à la faveur des cantons interdits aux voitures"
Un honnête homme, sans nul doute...