lundi 17 août 2015

L'éveil de Louis XV à la sexualité (1)

Sans doute s'agit-il d'une forme de vice, mais je me délecte du regard que posent les traditionalistes sur notre lointain passé. Les uns pestent contre l'actuelle dépravation des moeurs, les autres plaident en faveur d'une restauration de l'ordre moral traditionnel, et dans leur curieuse Théogonie, tous s'entendent pour considérer que 1789 marque décidément la fin de notre âge d'or.
Car les preuves de la chute sont là ! clament-ils en choeur, tout en vociférant contre les textes et autres projets sur l'adoption, l'euthanasie, l'avortement, le mariage homosexuel ou encore la théorie du genre...
Dans le même temps, ils réécrivent le roman national, celui d'un Ancien Régime mythifié, porteur de repères moraux et de valeurs pérennes.
l'indicible Béatrice Bourges, porte-parole du Printemps Français
Marion Sigaut, éructant contre les instituteurs qui apprennent la masturbation à l'école...
Farida Belghoul, l'initiatrice de la sinistre JRE
Je pensais à eux tout récemment en lisant l'excellent Louis XV, libertin malgré lui de Maurice Lever, dans lequel l'historien rappelle notamment quelques anecdotes méconnues sur l'adolescence du roi bien-aimé.
L'une d'elles, datant de 1722, mérite d'être racontée.
Louis a 12 ans, et au grand désespoir de son entourage, il semble davantage attiré par les garçons que par les jeunes filles. Comme l'explique alors la duchesse de la Ferté, la galanterie des rois roulait l'un après l'autre sur les hommes et sur les femmes, qu'Henri II et Charles IX aimaient les femmes, et Henri III les mignons ; Henri IV aimait les femmes, Louis XIII les hommes, Louis XIV les femmes, et qu'à présent le tour des mignons était revenu (propos rapporté par Marais dans ses mémoires).
Parmi ses favoris les plus proches se trouvent le duc d'Antin, le duc de Gesvres et le duc de la Trémoille, alors âgé de 14 ans et premier gentilhomme de la chambre du roi. En compagnie de leurs amis d'Alincourt, Boufflers, Meuse (le futur Choiseul) et Rambure, ils ont pris pour habitude de se livrer à ce que Maurice Lever nomme des "débauches secrètes", et Jean-Christian Petitfils de "singulières nocturnales"... Celle d'août 1722 va provoquer un scandale public puisque ces derniers s'adonnent à leur bacchanale nocturne jusque sous les fenêtres du roi ! Plein de pudeur, le journaliste Barbier explique que "le marquis de Rambures... toute la bande" (à vous de compléter)...Cette fois, la Cour se doit de réagir. Comme nous l'explique le mémorialiste Marais, le maréchal de Villeroy fait exiler son petit-fils à Joigny, le duc de Boufflers est exilé en Picardie alors que le marquis de Rambure est mis à la Bastille.
Pour cette fois, le jeune Louis est épargné par le scandale.
Cela ne durera pas. Là encore, donnons la parole à Marais, en date du 27 juin 1724 :
"La Trémoille - Le propre jour que le maréchal de Villeroi est venu à Versailles, on a découvert que le jeune duc de la Trémoille, premier gentilhomme de la chambre du roi, lui servait plus que de gentilhomme et avait fait de son maître son Ganymède. Ce secret amour est bientôt devenu public..."
Dans la bouche de Voltaire, le propos se fait encore plus cru : 
"La Trimouille est exilé de la Cour. C'est pour avoir mis très souvent la main dans la braguette de sa majesté très chrétienne" (lettre de juillet 1724 à Madame la Présidente de Bernières).
En effet, dès le lendemain, son tuteur envoie le jeune Trémouille à l'académie "pour apprendre à régler ses moeurs" (Journal de Paris, Marais).

(à suivre)

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