En son temps, les aventures amoureuses d'Armand de Madaillan de Lesparre (1653-1738), dit le Marquis de Lassay, défrayèrent la chronique et lui valurent le surnom de Don Juan du Grand Siècle.
le marquis de Lassay |
Ignorée du public, son oeuvre littéraire n'en mérite pas moins le détour, notamment cette Relation du Royaume de Félicie, une utopie écrite en 1726. Bien avant Voltaire et son Eldorado (dans Candide en 1759), l'auteur y décrit un lieu coupé du monde dont la capitale, Leliopolis, apparaît comme l'exact opposé de Paris...
Sa critique politique semble quant à elle bien plus impertinente que celle du patriarche de Ferney...
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Après le naufrage, le narrateur découvre l’île de Félicie. Dans ce passage, il évoque les
caractéristiques de ce royaume.
Il
est borné d’un côté par la mer, des trois autres côtés par de fort hautes
montagnes qui le séparent d’autres peuples, et par une grande rivière qui sort
de ces montagnes, et prenant son cours du côté de la Ligne, va se jeter
dans la mer, à vingt lieues au-dessous de la ville capitale qui est bâtie sur
cette rivière à la même élévation que Marseille, et qui s’appelle Leliopolis.
Cette ville, qui est extrêmement peuplée, est à peu près grande comme Paris,
mais bâtie beaucoup plus régulièrement, d’une pierre jaspée, aussi belle
que le marbre, et pavée d’un pavé blanc et rouge, fort dur ; les maisons
n’y sont pas aussi hautes qu’à Paris, mais plus égales, les rues sont tirées au
cordeau, avec de grandes places d’espace en espace ; des fontaines et des
édifices publics magnifiques, et surtout les temples où ils s’assemblent pour
faire leurs prières. (…) Les sciences et l’étude sont aussi du goût de la
nation, et il y a quantité de gens savants parmi eux : ils ont poussé
leurs connaissances fort loin, et ils ont des livres admirables dans presque
tous les genres d’écrire ; ils nous surpassent dans la plupart des arts ;
ils excellent dans la poésie, dans la musique, dans l’architecture, dans la
sculpture et dans la peinture. (…) Ils sont persuadés que la vraie gloire d’un
roi consiste à rendre les peuples heureux, et à laisser ses voisins en
repos ; si bien que les rois des Féliciens, élevés dans ces maximes et
instruits par leurs pères, observent régulièrement le traité fait avec leurs
peuples, et les conditions auxquelles ils les ont élevés sur le trône ;
contents de l’autorité qui leur a été accordée, ils ne songent point à empiéter
sur la liberté de leurs sujets, qui de leur côté rassurés par l’exemple des
siècles passés, ne craignent rien de leurs rois et ne sont occupés qu’à donner
des marques de leur zèle et de leur reconnaissance à des princes qui les ont
toujours rendus heureux.
La
moindre révolte serait punie par les plus cruels supplices ; car il n’y a
que la nation entière, représentée par ses députés qui composent les états du
Royaume, qui soit en droit d’examiner la conduite du roi ; et chaque
particulier, quelque grand qu’il soit, lui doit une obéissance aveugle.
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