Scène première
Flore. Elle entre en fredonnant l’air suivant
Air : à l’ombre d’un vieux chêne
Les couilles de mon père
Sont pendues au plancher
Ma mère se désespère
De les voir s’dessécher (bis)
(elle s’interrompt)
Comment, personne ici ? où donc est cette salope de
Justine, cette gueuse d’Eléonore… On ne sait pas ce qu’elles deviennent ;
pour des femmes publiques elles ne sont guère rangées…
(elle continue son air)
Parfois elle les presse
Pour en tirer le jus
Et s’en frotter les fesses
Et les babines du cul. (bis)
Scène II
FLORE, LA MERE L’EVEQUE
La mère l’évêque
Chante, chante bougresse, je te ferai déchanter.
Flore
C’est vous, maman, qu’avez-vous donc ?
La mère l’évêque
Ce que j’ai, sacré nom d’un foutre ! Ce que j’ai… je
suis d’une colère affreuse.
Flore
Pourquoi ?
La mère l’évêque
Comment… je suis déshonorée ! onze heures sonnent, la
galerie pleine d’hommes ; des officiers, des sénateurs, des étrangers et
pas un miché (1) !... salopes que vous êtes, qu’on vous foutes donc pour cent
louis d’or et de diamants sur le cul… pas un miché ! … et moi, qui ai fait
repeindre mon grand salon avec
dorures, bordures antiques, dans le goût le plus moderne… et pas un
miché !
Flore
Ne vous fâchez pas, maman.
La mère l’évêque
Mille tonnerres, je ne me fâche pas, mais foutre est-ce la
peine de se jeter dans les dépenses infernales quand le commerce est
mort ; quand l’homme ne donne plus, quand il faut payer au gouvernement
mille écus de patente, au propriétaire mille écus de loyer, et puis les
chirurgiens, les médecins, couturières, marchandes de mode, coiffeurs, et
par-dessus tout cela, des guenons comme vous, qui ne gagnez pas seulement ce
que vaut la peau de votre cul, qui mangez et buvez comme des gouines, et qui
restez toute la journée, les bras croisés et les jambes pendantes à vous
grattez la motte… beau bénéfice !
(…)
LES PRECEDENTS, JUSTINE, LEONORE, JOSEPHINE
(elles reprennent le refrain en chœur)
Faites-nous foutre sans cesse,
Au lieu de vous foutre à l’eau (bis)
La mère l’évêque, ironiquement
Voilà un bordel bien monté !... d’où venez-vous donc si gaiement ?
Joséphine
Joséphine
Moi ? je viens de faire des hommes ; voilà deux louis, j’ai monté deux militaires et mon gros banquier anglais : il m’a régalé de punch… Oh ! c’est un bon enfant, vivent les banquiers !
Air : j’ai vu partout dans mes voyages
Air : j’ai vu partout dans mes voyages
Moi, je préfère cette race,
Faut-il en dire la raison,
Jamais ils ne font la grimace,
Et leur argent coule à foison.
Ils sont nos uniques ressources,
Chez nous dans un besoin urgent,
En leur grattant un peu les bourses
Nous faisons tomber leur argent (bis)
Léonore
Léonore
J’ai été plus malheureuse. J’ai eu affaire à un vieux procureur : j’ai fait tout mon possible, mais il avait le cœur trop dur et le vit trop mou ; pourtant il avait apporté des verges pour se faire fouetter ; j’ai usé la poignée, je me suis démanché le poignet, et l’animal ne bandait pas plus que la comète (...)
(1) miché : client d'une prostituée
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