dimanche 8 juillet 2012

Sophie d'Houdetot, le seul "amour" de Rousseau (4)

Sophie et Jean-jacques (lithographie XIXè)
Au fond, je crois que c'est avant tout la relation de Rousseau aux femmes qui séduit les lecteurs (et les lectrices !) dans "la Comédie des Masques". Et notamment le psychodrame amoureux qui a agité la vallée de Montmorency au cours de l'été 1757.
Aujourd'hui, le public a visiblement faim d'amour, et même s'il se moque des déclarations enflammées des anciennes romances, il en conserve du moins la nostalgie. C'était déjà le cas au XVIIIème, lorsque les femmes du monde louaient "la Nouvelle Héloïse" pour une heure ou une journée, et que l'histoire d'amour entre Julie et St Preux devint ainsi le best seller incontesté de ce siècle où la raison triomphait.
"Et pour cette fois, ce fut de l'amour", nous dit Rousseau à propos de Madame d'Houdetot. Souvenons-nous de la scène. Jean-Jacques est à l'Ermitage lorsque Sophie, qu'il connaît déjà depuis quelques années, lui rend visite au printemps 1757.  "Elle était à cheval et en homme. Quoique je n'aime guère ces sortes de mascarades, je fus pris à l'air romanesque de celle-là...". La gravure de Johannot restitue intelligemment la scène : Madame d'Houdetot porte un habit de cavalier, une culotte, et elle tient une cravache à la main. Elle domine le Genevois, que le graveur a choisi de représenter assis à son bureau de travail.  
Selon Georges May ("Rousseau par lui-même"), Rousseau a toujours perçu les brunes comme des femmes dominatrices : "celles-ci le bousculent un peu, le traitent parfois en esclave transi, assoiffé d'ordres, d'humiliations et peut-être de sévices". C'est vrai à Turin avec Madame Basile qui lui indique une natte sur laquelle il se jette à genoux, c'est vrai encore avec Madame de Larnage qui lui fait découvrir la volupté dans l'amour. 
A l'opposé, Rousseau évoque souvent "la douceur des blondes", (on pense à Madame de Warens ou à Madame Dupin), et lorsqu'il imagine les deux personnages féminins de la Nouvelle Héloïse, on ne s'étonne guère de trouver sous sa plume : "Je fis l'une brune et l'autre blonde, l'une vive et l'autre douce."
Pour un peu, on dirait du Baudelaire avant l'heure !
Sophie à l'Ermitage
Vous l'aurez deviné, Sophie d'Houdetot était brune. Elle avait une "forêt de grands cheveux noirs, naturellement bouclés, qui lui tombaient au jarret."(Confessions)
Dans "la Comédie des Masques", je l'ai pourtant voulue blonde, d'une blondeur hitchcockienne, peut-être ingénue, certainement enchanteresse, mais également superficielle et traîtresse... Avec Louise d'Epinay, Louise Dupin et Thérèse Levasseur, elle formait un quatuor féminin que j'ai pris un plaisir immense à mettre en scène !

mercredi 4 juillet 2012

Tricentenaire Rousseau

Il y a pire que d'oublier son passé.
C'est de le nier, ou encore de le travestir.
Il ne vous aura pas échappé qu'on fait peu de cas, en France, de la célébration du "tricentenaire Rousseau". Quelques dossiers çà et là dans la presse, souvent bâclés (cf le tout récent Télérama), des manifestations annoncées comme festives, généralement qualifiées de "pique-niques républicains", auxquelles les médias locaux consacrent au mieux un entrefilet complaisant, quelques conférences encore sur le Rousseau herboriste, le Rousseau musicien, le Rousseau amoureux de la nature...
Voilà à quoi on réduit l'un des plus grands penseurs du XVIIIème siècle, celui que Mély surnommait autrefois l'"intellectuel en rupture". De sa pensée politique, on ne dit mot. Ni de son Contrat Social, ni de son Discours sur l'Inégalité. J'écoutais dernièrement le sociologue Alain Soral rendre hommage au Genevois (voir ci-dessous) au cours d'une intervention qui remettait ce second discours en perspective. Effectivement, l'homme de la nature n'intéresse guère Rousseau, sinon comme point de comparaison avec l'homme social. L'histoire de nos sociétés est celle de l'aliénation progressive du pauvre au riche. Ce dernier s'approprie les moyens de production, les biens, les terres, et condamne le moins habile à la dépendance. Pour légitimer l'usurpation de ces biens, les possédants imaginent l'ordre civil, la création de lois et de règlements qui les protégeront des indigents. Chez Rousseau, les premières lois sont nécessairement injustes car imaginées par une oligarchie craignant de se voir dépossédée. Et le dernier tour de force consiste, in fine, à transformer ce pouvoir économique en pouvoir politique, et à le rendre héréditaire.
Chez Rousseau, l'histoire de l'homme est bien celle d'une chute, mais celle-ci est liée à la socialisation et non au péché originel.
Le Contrat Social prolonge cette première réflexion et s'interroge sur la notion d'intérêt général et sur celle de souveraineté. Selon Rousseau, cette dernière appartient au peuple (rien de nouveau jusque-là), mais contrairement à ses prédécesseurs, Rousseau prétend que cette souveraineté est inaliénable et que le peuple est donc condamné à l'exercer ! Il ne saurait confier le pouvoir à Dieu, à ses représentants, au roi, à des ministres ou à qui que ce soit d'autre... 
Inutile, j'imagine, de poursuivre trop avant. Si la pensée d'un Voltaire, celle d'un Diderot ou d'un Montesquieu s'inscrivent dans un processus historique en cours, celle de Rousseau est profondément subversive parce qu'elle pointe du doigt nos erreurs passées et présentes. Et ce faisant, elle nous amène à repenser notre relation au monde, au travail, au religieux et à la chose politique... 
Cet aspect pourtant capital de la pensée rousseauiste est aujourd'hui totalement esquivé dans les programmes scolaires. On lui préfère (au mieux) une étude des 6 premiers livres des Confessions, ceux dans lesquels le Genevois recrée son enfance. Et au passage, on élude les 6 suivants, où Rousseau dénonce le complot des philosophes contre sa personne ! Mais là encore, peut-être vaut-il mieux garder intactes certaines figures de notre passé littéraire...



Gérard Collard
NB : Je tenais à vous remercier de l'accueil enthousiaste que vous avez réservé au "Voile déchiré", mais également à "la Comédie des Masques", qui est paru en folio le mois dernier.
Evidemment, je sais ce que je dois à Gérard Collard, dont les multiples interventions sur France 5, LCI et France Info ont placé mes deux romans sous le feu des projecteurs.
N'appartenant à aucun "réseau", je suis d'autant plus sensible à cette main qu'il m'a tendue...
Car qu'il ait aimé mes deux romans est une chose. Mais qu'il vous les fasse aimer en est une autre. Pour cela, je lui exprime toute ma reconnaissance. OM

vendredi 29 juin 2012

Les Lumières, un antihumanisme....

Se revendiquant de Henri Guillemin, l'historienne Marion Sigaut évoque ci-dessous ce qu'elle nomme l'antihumanisme des Lumières.
Très manichéenne, Madame Sigaut oppose l'"antihumanisme" des Lumières à l'humanisme des Jésuites.
Voyez plutôt...

http://www.dailymotion.com/video/xrqrm0_marion-sigaut-les-lumieres-un-antihumanisme-marseille_news?search_algo=1

dimanche 17 juin 2012

Radio Notre Dame, le 18 juin

J'interviendrai demain soir (19h05) sur Radio Notre Dame dans l'émission de Denise Dumolin. Tous les détails en cliquant sur le lien ci-dessous
 http://radionotredame.net/emission/promenade-litteraire/18-06-2012/ 

samedi 16 juin 2012

France Info 16-06

Du polar à l'occasion du salon international du livre au format de poche à Saint-Maur - A livre ouvert - Livre - France Info


Valérie Expert et Gérard Collard ( à partir de la 5è minute)

Baptême de la rose Louise Dupin à Chenonceau

Un immense merci à Laure Menier pour cette invitation. Je mesure le privilège qu'on m'a accordé de partager ce déjeuner avec Mme Elisabeth Badinter. Une grande dame... 
Son "Emilie, Emilie", ses "Passions intellectuelles", m'ont accompagné tout au long de mon travail sur Rousseau...

 les deux premiers clichés publiés avec l'aimable autorisation de Guillaume Souvant-  http://www.guillaume-photographe.com




 

mercredi 13 juin 2012

Chenonceau, 14 juin

Déjeuner à Chenonceau, demain, à l'occasion du baptême de la rose Louise Dupin. La manifestation sera parrainée par Mme Elisabeth Badinter.

samedi 9 juin 2012

Rousseau vu par... LAFAUTEAROUSSEAU

Pour illustrer le propos très juste d'Alain Soral (voir vidéo du 4 juin), je reproduis ci-dessous cet article extrait du site "royaliste" LAFAUTEAROUSSEAU.

Surprenant de retrouver, qualifiant Rousseau, des expressions creuses comme le "faux prophète" qui conclut l'article. On croirait entendre Voltaire, Grimm, Diderot et tous les frères de la clique encyclopédiste...

 

 

 

Rousseau ? Connais pas !......

rousseau,maurras,révolution,chateubriandJean-Jacques est né en 1712 : c’est donc son tricentenaire que l’on fête cette année, à la fin de ce mois, le 28 juin. Mais qui "on", et quelle fête ? RIEN ! La seule manifestation d’importance se tiendra non pas à Paris mais à Genève et elle traitera "des amis et des ennemis de Jean-Jacques" : autant dire que la louange et l'unanimisme ne sont pas de rigueur, et qu'il y a même de la contestation dans l'air...
Pour le reste, quelques malheureux "pique nique républicains tirés du sac" (!) et encore, uniquement dans le département de l'Ain; quelques lignes dans tel ou tel Blog confidentiel : c’est éloquent, et si l’on préfère une autre expression, cela en dit long…. Sic transit !
Eh, oui : Les virus, les idéologies meurent aussi : tricentenaire de Rousseau ? le flop…
Nous ne sommes pas si ingrats, à lafautearousseau : Jean-Jacques est présent , et célébré (!), en permanence sur notre Blog : par notre titre, d'abord - et, donc, tous les jours... - mais aussi parce que nous lui consacrons notre IXème Grand Texte, Jean-Jacques, faux prophète, de Charles Maurras.
Mais, trêve de plaisanterie, allons un peu plus au fond des choses, car, au fond, cette désaffection appelle - et permet... - certaines réflexions, notamment celle-ci...
Qui sème le vent, récolte la tempête, dit le proverbe. Il en est de même pour qui prétend déraciner et faire ignorer : finalement, la conspiration du silence finit par se retourner contre ceux-là même qui l'avaient organisée, et contre leurs propres "gloires", qui n'en sont plus ! Organisée et voulue par le ministère de la des-Éducation nationale, l'ignorance de tout ce qui est le passé national, finit par créer également l'ignorance de tout ce qui se voulait les "valeurs" nouvelles, que l'on prétendit substituer aux anciennes....
On pense irrésistiblement à l'apostrophe fameuse d'un député royaliste à Jules Ferry, lorsqu'il imposa son funeste Article 7, interdisant l'enseignement aux congrégations non "autorisées" : "Vous allez faire une jeunesse qui ne croira à rien, pas même à vous !" Nous y sommes : "ils" ont tout oublié, Bayard et les cathédrales, certes, mais aussi Rousseau et tutti quanti !.... Ceux qui ont voulu "du passé faire table rase" ont réussi au-delà de leurs espérances : ils ont abouti à la table rase de tout, même de leurs propres croyances, illusions et nuées !
Ignorance voulue et organisée des racines chrétiennes et spirituelles de la France "d'avant" ? Ignorance de tout et de tous, ignorance tout court, vide intégral, vacuité totale, répond l'écho.....
Pauvre Rousseau ! Au moins Maurras était-il capable de réciter des pages entières de La Nouvelle Héloïse; et Chateaubriand a-t-il écrit ce bel éloge de Jean-Jacques : "..."Rousseau", écrivais-je dans une de ces Remarques, "n'est décidement au-dessus des auteurs de son temps que dans une soixantaine de lettres de la Nouvelle Héloïse, dans quelques pages de ses Rêveries et de ses Confessions. Là, placé dans la véritable nature de son talent, il arrive à une éloquence de passion inconnue avant lui. Voltaire et Montesquieu ont trouvé des modèles de style dans les écrivains du siècle de Louis XIV; Rousseau, et même un peu Buffon, dans un autre genre, ont créé une langue qui fut ignorée du grand siècle."
Mais, aujourd'hui ? Les enfants de ce monde que Ferry (Jules) se flattait d'organiser "sans Dieu et sans Roi", ils sont surtout sans rien : sans Dieu et sans Roi, certes, mais surtout sans rien, rien du tout : c'est le naufrage du Titanic à grande échelle, pour tout et pour tous.....
Et en l'occurrence pour Jean-Jacques, ce faux prophète....

vendredi 1 juin 2012

4è de couverture

"Rousseau, le voile déchiré" (Tome 2) d'Olivier MARCHAL
En librairie le 7 juin 2012


"Français, on vous tient dans un délire qui ne cessera pas de mon vivant. Mais quand je n'y serai plus et que votre animosité, cessant d'être attisée, lai
ssera l'équité naturelle parler à vos coeurs, vous regarderez mieux, j'espère, à tous les faits, dits, écrits, qu'on m'attribue..."
Jean-Jacques ROUSSEAU
A tout Français aimant encore la justice et la vérité


Début des années 1770. 
Bernardin de Saint-Pierre rencontre un Rousseau vieillissant et rejeté par tous, Diderot, D'Alembert, Grimm, Mme d'Epinay...
Quelle est la raison de cette exclusion dont Rousseau est l'objet ? Est-ce bien un complot destiné à le discréditer ?
Bernardin cherche la vérité, il reçoit les confessions de Rousseau et de ses anciens amis afin de faire la lumière sur ce génial égoïste.

Riche de détails méconnus et remarquablement documenté, ce livre s'attache à répondre aux interrogations qui pèsent encore, plus de deux siècles après sa mort, sur le véritable caractère du philosophe le plus marquant des Lumières.