Au fil de mes lectures, Louise d'Epinay est peut-être le personnage auquel je me suis le plus attaché. Comment pourrait-il en être autrement tant son destin est singulier ! Mariée à l'âge de 19 ans à un fermier général dont elle est amoureuse, Louise découvre très tôt à quel point sa conception du mariage et du rôle de mère peut paraître iconoclaste aux yeux du monde dans lequel elle vit. En effet, si l'inconstance conjugale n'avait alors rien d'un vice, la fidélité était quant à elle considérée comme une valeur du passé. Et que dire du maternage, considéré comme indigne d'une femme du monde ?
En prenant successivement Francueil puis Grimm pour amants, Louise montre qu'elle renonce à certaines de ses illusions. Dans le même temps, elle parvient à s'émanciper de la pression familiale et revendique la prise en charge de l'éducation de son fils aîné, né en 1746. Considérant que l'éducation traditionnelle dans les collèges religieux est inepte, elle est l'une des premières à prétendre que la mère doit se charger elle-même de ses enfants, non seulement pour les instruire mais également pour les éduquer. Rousseau lui doit peut-être certaines de ses idées, rapportées dans son Emile. Ainsi, c'est Louise qui conçoit le programme éducatif d'Angélique, sa fille née en 1749.
A la fin de sa vie, Louise d'Epinay écrira pourtant : "Perfectionner l'éducation ! Cette prétention me rappelle une conversation que j'eus il y a quinze ans avec JJ Rousseau ; il y soutenait que les pères et les mères ne sont point faits par la nature pour élever... Cette opinion me révolta. Mais maintenant le voile est déchiré ; j'en suis fâchée ; Jean-Jacques a raison."
Que s'est-il passé entretemps ? Amoureux du jeu mais criblé de dettes, son fils aîné est bientôt contraint de quitter son poste de conseiller. Nous sommes en 1769. Comme ses frasques reprennent de plus belle, Louise sollicite une lettre de cachet pour le faire jeter en prison, où il restera deux ans.
Nouvelle désillusion pour elle, qui a vu au fil de sa vie tous ses rêves s'éloigner les uns après les autres... Et encore, nous n'avons parlé que de la mère. La femme également connut bien des malheurs. Nous y reviendrons.
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