vendredi 13 avril 2012

Sophie d'Houdetot, le seul "amour" de Rousseau (3)

Sophie d'Houdetot
Sophie joue indéniablement un rôle essentiel dans la vie de JJ Rousseau. Pour s'en convaincre, il suffit de relire les passages des Confessions (livre IX) qui sont consacrés à la cousine de Louise d'Epinay. Elle n'était "point belle", reconnaît pourtant le Genevois, et son visage "était marqué de la petite vérole", ce que confirment d'autres portraits établis à la même époque. On sait qu'au cours de cette année 1757, Rousseau poursuit la rédaction de sa Nouvelle Héloïse, que dans sa solitude il a rejoint sa Julie "au pays des chimères". Faute de pouvoir satisfaire son besoin d'amour, il va s'emparer de Sophie, qu'il connaît pourtant depuis 1748, pour donner chair à son personnage. "Je ne vis plus que Mme d'Houdetot, mais revêtue de toutes les perfections dont je venais d'orner l'idole de mon coeur." De nombreux critiques ont évidemment relevé les très nombreux points communs entre le couple St-Preux/Julie d'une part, et Rousseau/Sophie d'autre part. Ainsi, lorsque St-Preux, Julie et son mari s'installent en toute quiétude sous le même toit, les deux premiers se croyant purgés de leur désir destructeur, on pense immédiatement à la situation de Rousseau, confronté au couple Sophie d'Houdetot/ St-Lambert. Rousseau lui-même s'est appliqué à laisser planer le doute sur l'existence réelle de ses personnages. On pourrait rétorquer qu'ayant achevé son roman en 1758, ce même récit était suffisamment avancé un an plus tôt, et que Sophie d'Houdetot n'aurait donc pas pu constituer un modèle unique au personnage de Julie.
Mais au fond, cela importe peu.
St-Lambert
Autant dans la réalité que dans la fiction, Rousseau présente ces deux épisodes amoureux comme des moments de plénitude. Autant pour St-Preux que pour lui... Il faut y voir, selon moi, le rêve d'une société à trois, aussi sincère qu'innocente, qui permette d'une part de prolonger (indéfiniment ?) l'ivresse de la passion, et d'autre part d'éluder la question de la possession charnelle (celle-ci étant réservée à l'époux). 
Pour ma part, je crois que si des éléments extérieurs n'étaient intervenus, Rousseau aurait prolongé indéfiniment sa chaste idylle avec Sophie. Et j'ose penser que ni elle ni St-Lambert n'auraient eu à craindre outre-mesure les ardeurs de notre philosophe...

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