mardi 18 juin 2019

Antisémite ? Voltaire essuie les crachats des Anti-Lumières

Né dans le dernier quart du XVIIIè siècle, le courant des Anti-Lumières a produit quelques penseurs honorables, dont Joseph de Maistre ou encore l'Irlandais Edmund Burke.
L'une de leurs antiennes, enracinée depuis plus de deux siècles, est la détestation de Voltaire : sa vie, son oeuvre, ses combats, rien ne trouve grâce à leurs yeux, et 250 ans après la mort du patriarche de Ferney, il s'en trouve encore pour l'agonir d'injures et cracher leur bile sur sa tombe.
Pourquoi lui et pas les autres, me direz-vous ? 
La réponse est assez évidente, elle tient dans cette exhortation adressée par Voltaire à son ami d'Alembert en 1760 : "Serait-il possible que cinq ou six hommes de mérite (entendez : les Encyclopédistes) qui s’entendront ne réussissent pas après les exemples que nous avons de douze faquins (entendez : les apôtres) qui ont réussi ?"
La mise à mal de l'Infâme, la voilà cette grande victoire qu'ils ne lui ont jamais pardonnée. D'abord ce combat mené pendant près de trente années contre, pêle-mêle, les dignitaires jésuites, les convulsionnaires jansénistes, l'Inquisition, les superstitions, les vérités soi-disant révélées et plus généralement les dogmes chrétiens. Et puis ces cris de joie poussés après chacun de ses triomphes, comme au jour de la réhabilitation de Calas : "c'est pourtant la philosophie toute seule qui a remporté cette victoire. Quand pourra-t-elle écraser toutes les têtes de l'hydre du fanatisme ?" (lettre à d'Argental en 1765).

*** 

Parmi les crachats lancés au visage du philosophe, on trouve quasi systématiquement cette accusation d'antisémitisme (ou parfois, de manière plus sensée, d'antijudaïsme), déjà esquissée sur un mode mineur par l'Abbé Guenée en 1769 (voir ci-dessous)


Sous l'Occupation, Voltaire sera même instrumentalisé par les collaborationnistes afin de légitimer la politique anti-juive initiée par l'occupant. Prenons l'exemple du dénommé Henri Labroue, ancien député de gauche, auteur de "Voltaire antijuif", vaste compilation de citations sorties de leur contexte pour servir les desseins de l'écrivailleur. Ce dernier en sera largement récompensé par les autorités en place qui lui confieront une "chaire d'histoire du judaïsme" à la Sorbonne. Notons qu'au cours de la leçon inaugurale, le 15 décembre 1942, le néo-professeur assena un tel chapelet d'inepties (les juifs constituent "une sous-race métissée par les races arménoïde et araboïde") que le cours s'acheva dans le chahut général aux cris de "bandit" ou encore "canaille".
Evidemment, la presse collaborationniste donna une tout autre version de l'événement (voir ci-dessous).





Plus récemment, l'historien du droit Xavier Martin, très apprécié des milieux chrétiens, a lui aussi cousu son patchwork de citations pour mettre en évidence les innombrables défauts de Voltaire (voir ici), réduit au rang de méchant homme, menteur, homosexuel, sataniste, et même d'inspirateur du nazisme... n'en jetons plus, la cour déborde d'immondices !
Petit florilège....





On ne saurait passer sous silence les travaux (certes plus modestes) de Marion Sigaut, proche d'Alain Soral et des catholiques traditionalistes qui l'emploient pour effectuer leurs basses oeuvres antirépublicaines.
Aux attaques des précédents, elle ajoute sa touche personnelle avec (notamment) une relecture ébouriffante des affaires Calas et Damiens (voir ici).

Toujours du côté d'Alain Soral, les éditions Kontre Kulture annoncent la parution d'un énième "Voltaire antisémite" (écrit par un certain Félix Niesche), ouvrage dont on peut craindre le pire à en croire la 4è de couverture (voir ci-dessous) qui débute par cette phrase :
"S'en était fait de l'idylle entre François-Marie Arouet et moi..."




A force de les agacer, le facétieux Voltaire leur fait perdre jusqu'à leur latin...

O.M


2 commentaires:

  1. je veux bien olivier mais qu'en est il du fait .Anti-juif ou non Voltaire ?

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  2. Voltaire était un sale bonhomme auquel on peut faire dire le tout et son contraire. X Martin l'a compris, M Sigaut n'en est hélas pas capable... Non, Voltaire n'était pas "raciste" à la manière d'un Drumont. S'il s'en est pris au judaïsme, à l'islam, au christianisme, c'est pour s'amuser de l'imposture des religions dites révélées (voir ses propos sur l'Ancien Testament). Au demeurant, si on lui avait proposé la place d'un Dubois ou d'un Fleury, gageons qu'il n'aurait pas craché dessus.

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