mardi 13 mars 2012

L'humanisme des Encyclopédistes

Dès qu'il est question d'avancées sociales, enseignants et hommes politiques prennent souvent en exemple le supposé humanisme des philosophes du XVIIIème siècle pour illustrer leur propos.
Ah, de combien de vertus a-t-on paré ces Encyclopédistes, pourfendeurs de toutes les injustices, quand dans le même temps les Jésuites et l'Infâme Eglise maintenaient le peuple dans l'ignorance et sous le joug royal ! Des Encyclopédistes droit-de-l'hommistes, défenseurs des pauvres gens, de ce tiers-état miséreux que Zola fera entrer en littérature un siècle plus tard !
Evidemment, ces lieux communs ne résistent guère à l'étude des bréviaires philosophiques, à savoir l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, mais également le Dictionnaire Philosophique de Voltaire.


L'Encyclopédie, tout d'abord, avec deux extraits d'articles méconnus :



Article DIMANCHE : "M. l’abbé de Saint-Pierre qui a tant écrit sur la science du gouvernement, ne regarde la prohibition de travailler le dimanche, que comme une règle de discipline ecclésiastique, laquelle suppose à faux que tout le monde peut chômer ce jour-là sans s’incommoder notablement. Sur cela il prend en main la cause de l’indigent ; non content de remettre en sa faveur toutes les fêtes au dimanche, il voudroit qu’on accordât aux pauvres une partie considérable de ce grand jour pour l’employer à des travaux utiles, et pour subvenir par-là plus sûrement aux besoins de leurs familles. Au reste on est pauvre, selon lui, dès qu’on n’a pas assez de revenu pour se procurer six cents livres de pain. A ce compte il y a bien des pauvres parmi nous.
Quoi qu’il en soit, il prétend que si on leur accordoit pour tous les dimanches la liberté du travail après midi, supposé la messe et l’instruction du matin, ce seroit une œuvre de charité bien favorable à tant de pauvres familles, et conséquemment aux hôpitaux ; le gain que feroient les sujets par cette simple permission, se monte, suivant son calcul, à plus de vingt millions par an."

Article MENDIANT :  "gueux ou vagabond de profession, qui demande l’aumône par oisiveté et par fainéantise, au lieu de gagner sa vie par le travail."


Voltaire
Le Dictionnaire Philosophique ensuite, avec cet extrait de l'article Fertilisation.

"6° La prétendue égalité des hommes, que quelques sophistes mettent à la mode, est une chimère pernicieuse. S’il n’y avait pas trente manoeuvres pour un maître, la terre ne serait pas cultivée. Quiconque possède une charrue a besoin de deux valets et de plusieurs hommes de journée. Plus il y aura d’hommes qui n’auront que leurs bras pour toute fortune, plus les terres seront en valeur. Mais pour employer utilement ces bras, il faut que les seigneurs soient sur les lieux.

16° Plusieurs personnes ont établi des écoles dans leurs terres, j’en ai établi moi-même, mais je les crains. Je crois convenable que quelques enfants apprennent à lire, à écrire, à chiffrer; mais que le grand nombre, surtout les enfants des manoeuvres, ne sachent que cultiver, parce qu’on n’a besoin que d’une plume pour deux ou trois cents bras. La culture de la terre ne demande qu’une intelligence très commune: la nature a rendu faciles tous les travaux auxquels elle a destiné l’homme: il faut donc employer le plus d’hommes qu’on peut à ces travaux faciles, et les leur rendre nécessaire."

Humanisme, lisait-on plus haut. Je vous laisse en juger...


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