lundi 9 janvier 2017

Benoît Garnot à propos de l'exécution des homosexuels Diot et Le Noir

J'ai déjà eu l'occasion de parler des travaux de Benoît Garnot, professeur à l'université de Bourgogne, notamment pour son excellent ouvrage consacré à Voltaire (c'est la faute à Voltaire... une imposture intellectuelle),  dans lequel il revenait sur les grands combats judiciaires menés par le patriarche de Ferney.
Dans cet autre ouvrage paru chez Belin en 2008, On n'est point pendu pour être amoureux, il s'interroge sur la répression de certaines pratiques amoureuses considérées comme scandaleuses ou tout simplement interdites.
Benoît Garnot
Au chapitre 5 ("l'amour prohibé"), il se penche plus particulièrement sur l'affaire Diot-Lenoir, du nom de ces deux Parisiens arrêtés puis condamnés à mort en juin 1750 pour crime de sodomie.

Voici ce qu'il en dit :
" Leur peine devait être commuée en détention en Bicêtre, mais il est statué in extremis de la leur appliquer (ndlr : la peine de mort) pour l'exemple ..." 
Avant de reconnaître : "En 1750, la justice ne croit donc plus vraiment à l'intérêt pédagogique d'une telle exécution et se contente de demi-mesures, hésitant entre la publicité pour répandre la peur du châtiment et l'absence de publicité pour éviter le mauvais exemple."
Soit. 
Mais alors pourquoi cette exécution en place publique ?
Benoît Garnot se garde bien de répondre à la question qui brûle les lèvres du lecteur.
On sait pourtant comment certains pseudo-historiens réactionnaires revisitent le fait divers (à ce sujet, voir Marion Sigaut ici). La mairie de Paris n'est d'ailleurs pas en reste, se servant des deux condamnés à mort pour alimenter son combat anticlérical.
Anne Hidalgo inaugurant la plaque commémorative en 2014

Benoît Garnot n'ignore rien de tout cela. Et pourtant, il reste silencieux, se contentant de prendre acte de l'exécution et de préciser que ce fut la dernière en France.
"Ce crime s'est désacralisé et laïcisé", précise-t-il, "ce qui autorise à le punir beaucoup moins sévèrement qu'on ne le faisait auparavant"
L'historien ne nous dira pas pourquoi la justice a condamné les deux hommes à mort. Il aurait sans doute pu approfondir la question et établir le lien avec l'affaire des enlèvements d'enfants (voir ici ce qu'en disent les mémorialistes de l'époque) survenue fin 1749-début 1750, et des émeutes populaires du mois de mai...
Car n'en doutons pas, Diot et Le Noir ont avant tout servi d'exemple pour calmer une populace chauffée à blanc. S'ils avaient été arrêtés quelques mois plus tôt ou plus tard, jamais une telle sentence n'aurait été mise à exécution.


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