mercredi 19 octobre 2016

La Marche rouge par Marion Sigaut - Episode 2



Quelques mois ont passé. Nous sommes désormais en mars 1750, et comme le précise Marion Sigaut, les arrestations de jeunes vagabonds et autres mendiants se poursuivent au vu et au su de la population parisienne. L'historienne commet cependant une erreur : en effet, les exempts n'obéissent pas à une "ordonnance de Berryer" (1 min 34), mais à l'ordonnance royale que nous avons reproduite dans le précédent article. Ils agissent donc bien sur "ordre du roi".
Ce même mois, d'Argenson note d'ailleurs dans son journal :

Avec un brin de cynisme, d'Argenson pointe du doigt le véritable fléau, à savoir la pauvreté grandissante qui attire les miséreux en ville où ils sont réduits à mendier au coin des rues. 

*** 

A bien y regarder, cette ordonnance royale pose pourtant problème. Si elle condamne les mendiants à l'enfermement dans une "maison de force" (comprenez : Bicêtre ou la Salpêtrière), elle ne précise pas la durée de cet enfermement ("tant et si longuement qu'il sera jugé nécessaire").
A charge pour le Lieutenant de Police Berryer de nettoyer le linge sale !

 
 Il a très vite mis en place une équipe répressive composée d'exempts auxquels il a donné les ordres suivants (décembre 49): "arrêter... tous les mendiants valides et invalides qu'ils trouveront à Paris : mais pour qu'il ne puisse point leur être imputé d'avoir fait des captures mal à propos et sans cause, je les ai chargés de conduire chez vous (ndlr : le commissaire)... tous ceux qu'ils arrêteront, afin que vous puissiez les entendre... A l'égard des hommes mendiants valides au-dessus de 60 ans, vous les ferez conduire à l'Hôpital Saint-Louis de l'ordre du roi. Vous enverrez dans les prisons de police tous les mendiants valides au-dessus de 60 ans de même que les invalides, et quant à ce qui touche les femmes, vous les ferez conduire à St-Martin..."
Mal vus par la population parisienne, ces exempts (voir la liste ci-dessous) sont souvent pris à partie au moment des arrestations : rue du Cherche-Midi en décembre, puis rue de la Madeleine, rue de Bretagne en janvier... La liste est sans fin.
liste des chasseurs de mendiants
 A cette liste, il faut en ajouter une seconde, sorte de police parallèle dont fait état Marion Sigaut dans son intervention : celle des "chasseurs d'enfants". La voici.

 Dans ses dépositions, le caporal Emmanuel Girault confirme que "pour les enlèvements d'enfants, il a suivi les sieurs Faillou et Danguisy dans l'expédition de 26 ou 27 enfants qu'ils ont pris, qu'il était en redingote et non en uniforme."
Après quatre mois de rafles, le peuple parisien est à ce point devenu méfiant que les exempts sont contraints de se déguiser pour effectuer le sale travail... 

(à suivre ici)

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