S'il est un fait divers qui défraya la chronique de la 2nde moitié du XVIIIè siècle, c'est bien celui de la fameuse "bête du Gévaudan", créature monstrueuse qui terrorisa entre 1764 et 1767 toute une région s'étendant de l'actuelle Lozère jusqu'aux départements voisins d'Ardèche, Haute-Loire, Cantal et Aveyron (voir ci-contre).
Loin de prétendre à l'exhaustivité, l'article ci-dessous s'inspirera des nombreux récits et études déjà consacrés à l'affaire, notamment l'impressionnante chronologie établie par l'auteur Alain Bonet dans son ouvrage : la Bête du Gévaudan : Chronologie et documentation raisonnées.
D'autres sources, tels que les registres paroissiaux, les correspondances ou encore les gazettes de l'époque, permettent elles aussi de rendre compte de cet épisode dont même les romanciers et autres cinéastes se sont emparés au cours du siècle passé.
Avant d'entamer mon récit, je tiens à présenter mes excuses anticipées à tous les passionnés (ils sont nombreux) pour les erreurs que je serais amené à commettre dans la relation qui va suivre.
le pacte des loups, Christophe Gans (2001) |
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En dépit de quelques morts suspectes au cours de l'année 1763, la première victime officielle de la Bête est une certaine Jeanne Boulet, âgée de 14 ans, tuée fin juin 1764 aux abords d'un village situé aux confins de la Lozère et de l'Ardèche, et "enterrée... sans sacrement, ayant été tuée par la bête féroce" (signé du curé local).
Début août, un peu plus à l'ouest, est tuée Marianne Hébrard, "étranglée et dévorée en partie par une bête féroce qui s'est établie
et qui roule dans le pays depuis quelques mois. Cet accident funeste à
l'humanité lui arriva en plein jour" (signé du curé local) ; le surlendemain, 8 août, nouvelle victime dans un vallon situé au sud de Langogne
Au cours des deux mois qui suivent, les attaques vont se multiplier, visant toutes des jeunes femmes ou des enfants.
Courant septembre, M. (de) Lafont, subdélégué de l'état du Languedoc, offre deux cents livres à qui apportera le corps du monstre à Mende. M. de Moncan, commandant de la même province, charge le capitaine Duhamel (à la tête d'un détachement de dragons) de
poursuivre le monstre afin de le détruire :
"…..il
est ordonné aux commandants des troupes, des maréchaussées, et aux
maires consuls et habitants du Vivarais et de Gévaudan, Velay et des
Cévennes de donner à M. Duhamel, capitaine aide major des dragons de
Clermont, toute la main forte nécessaire et même de concourir avec lui
pour parvenir à détruire le monstre ou léopard qui rôde depuis quelques
temps dans les montagnes du Vivarais et du Gévaudan, et qui se tient
presque toujours dans le bois du Choisinet. Permettons à cet effet aux
maires, consuls, notables et habitants de s’armer, bien entendu M.
Duhamel veillera à ce que tout se passe dans le meilleur ordre.
Fait à Montpellier, le 14 octobre 1764."
Entretemps, la bête a semble-t-il quitté le secteur de Langogne pour se déplacer plus à l'ouest, où les massacres reprennent. Mais cette fois, le modus operandi de l'animal a semble-t-il évolué puisque la victime est retrouvée décapitée... Les premiers témoignages, dont celui d'un certain La Barhe rapportent que " cette Bête a la tête large, très grosse, allongée comme celle
d'un veau et terminée en museau de lévrier ; le poil rougeâtre, rayé de
noir sur le dos, le poitrail large et un peu gris, les jambes de devant
un peu basses, la queue extraordinairement large et touffue et longue.
Elle court en bondissant, les oreilles droites ; sa marche au pas est
très lente. Quand elle chasse, elle se couche, ventre à terre et rampe :
alors elle ne paraît pas plus grande qu'un gros renard. Quand elle est à
la distance qui lui convient, elle s'élance sur sa proie et
l'expédition est faite en un clin d'œil…Sa taille est plus haute que
celle d'un grand loup. Elle est friande du sang, des tétons et de la
tête…revient, lèche la terre s'il y a du sang."
(à suivre)
ct b1
RépondreSupprimerMoa g b1 émé
RépondreSupprimerCette analyse du rapport Marin qui suit, a permis d’établir la nature exacte de la bête du Gévaudan : tout cela grâce à l’avancé de la science. Le rapport du notaire Marin sur les mesures des relevées de deux chirurgiens, faites sur la bête, date du 20 juin 1767. Contrairement à l’époque, les scientifiques des années 2000 sont arrivés à une traduction exacte.
RépondreSupprimerC’est normal, puisque nous sommes dans une époque moderne.
Commentaires orales, dans le film documentaire de David Teyssandier. « La bête du Gévaudan autopsie d’un mythe – une production la compagnie des taxi-Brousse, France 3 INA » : « Les mesures relevés par les anatomistes sont réunis dans le rapport du notaire Marin. Nous avions confiés ces notes au Museum d’histoire naturel de Paris, afin d’étudier la morphologie de la bête et de la comparé à celle du loup. Cette analyse complètement inédite, nous a permis d’établir la nature exact de la bête du Gévaudan. La bête n’est ni une Yenne ni un singe, ni tout autres animals exotique. »
Sa formule dentaire montre que cette bête est un canidé : « C’est un mâle de 109 livres (le poids normal d’un loup adulte.) Mais son museau est plus court que celui d’un loup, et sa tête plus large.
L’Arcade zygomatique surdimensionné laisse deviner une mâchoire particulièrement puissante, la crête du crâne et la taille des dents appartiennent au loup, mais la hauteur du profil et le stop du museau évoque incontestablement la morphologie du chien. De manière générale, l’avant du corps est proche de celui du chien, et l’arrière ressemble à celui du loup. Loin d’être une contradiction, la coexistence des deux morphotypes nous permet d’être affirmatifs. La bête du Gévaudan est donc un hybride entre un loup et un gros chien. Sans doute d’un chien Mâtin : ces conclusions sont confirmées par la tache blanche sur le poitrail de l’animal, et la grande longueur des griffes qui trahissent la domestication » (Fin des commentaires orales dans le grand documentaire de David Teyssandier : « La bête du Gévaudan autopsie d’un mythe – une production « la compagnie des taxi-Brousse, France 3 INA ».)