samedi 25 février 2017

Etre femme du monde au XVIIIè : illusions et désillusions (3)

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ETRE UNE MERE



En devenant mères, Louise Dupin, Louise d’Epinay et Emilie du Châtelet rempliront toutes la fonction qui leur est assignée : donner naissance à un garçon et perpétuer le nom de la famille.


Le rapport des parents aux enfants, même celui de la mère avec l'être qu'elle vient de mettre au monde, n’a pourtant rien à voir avec ce qu’il est devenu aujourd'hui.

Dans les 1ères années, on a évidemment recours à une nourrice. Ainsi, la famille Lalive (les beaux-parents de Louise d'Epinay) envoie l'enfant à plus de dix lieues de Paris. Le moyen idéal pour éloigner la jeune femme de son petit garçon... 
visite à la nourrice, par Fragonard

Plus tard, on s’adjoint les services d’une gouvernante ou d’un précepteur. Ils auront la charge d'éduquer l'enfant et de lui donner sa première instruction. 
Les garçons entreront ensuite au collège, les filles au couvent, en attendant d’être mariés à leur tour.
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Personne n'attend de ces mères qu'elles prennent soin de leurs enfants.
Ainsi, lorsque Louise soumet à son époux l'idée d'allaiter son premier né, Denis lui répond : « Que voilà bien une des folles idées qui passent quelquefois dans la tête de ma pauvre femme ! Vous, nourrir votre enfant ? J’en ai pensé mourir de rire. Quand bien même vous seriez assez forte pour cela, croyez-vous que je consentisse à un semblable ridicule ? » 
Dans l'esprit du financier, allaiter l'enfant serait un acte ridicule et surtout indigne d’une femme du monde. Dans ces familles, l’enfant est perçu comme une gêne, surtout dans ses jeunes années, d'où ces mesures d'éloignement.
Le témoignage de Louise d’Epinay est une nouvelle fois éclairant : « Hélas ! Tout ce que j’aurais désiré au monde, puisqu’il n’y avait pas de place pour lui dans la maison (rappelons que les Lalive possédaient un hôtel particulier à Paris et un château à la campagne...), aurait été de l’avoir assez près de Paris pour y aller tous les jours ; mais ma mère et mon beau-père, qui ont tout arrangé, ont choisi une nourrice qui demeure à près de dix lieues. Je dois aller demain le voir avec ma mère. Mon mari, qui ne l’a point encore vu, ce cher enfant, n’y peut pas venir »
Denis d'Epinay
 
 Ce désintérêt à l’égard de l’enfant peut également toucher la mère.
Le jour de la mort de son garçon (en 1734), Emilie du Châtelet écrit à son amant Maupertuis: « Mon fils est mort cette nuit…Si vous voulez venir me consoler, vous me trouverez seule. J’ai fait défendre ma porte, mais je sens qu’il n’y a point de temps où je ne trouve un plaisir extrême à vous voir »

Et dans une autre lettre : « j’ai perdu le plus jeune de mes fils. J’en ai été plus fâchée que je ne l’aurais cru et j’ai senti que les sentiments de la nature existaient en nous sans que nous nous en doutassions »

 Ses enfants seront tous pris en charge et instruits par des précepteurs, celui de Louise Dupin sera quant à lui mis en pension chez un précepteur savant à Paris.
 
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 Si l’instruction est semble-t-il assurée, l’éducation est quant à elle souvent négligée.
 Chargé un temps de du petit Dupin, Rousseau renonce avec ce commentaire concernant sa mère : « elle ne voulait pas qu’il fût contrarié »
Comme une mauvaise graine ne saurait donner un bon arbre, ces garçons tourneront mal : l'un comme l'autre s'adonneront aux jeux d'argent et accumuleront les dettes. Louise d’Epinay et Louise Dupin solliciteront elles-mêmes une lettre de cachet pour les faire enfermer en prison. Cette dernière ira jusqu’à exiler son fils unique à l’Ile Maurice. Il y mourra en 1767.

(à suivre ici)



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