mercredi 27 septembre 2017

L'Eglise et l'esclavage au XVIIIè siècle (3)


"Tu aimeras ton prochain comme toi-même", nous ordonne l'Evangile selon St Marc. Informé de ce commandement, un élève m'interroge sur l'attitude de l'Eglise face à la traite négrière pratiquée par la France et d'autres pays d'Europe au XVIIIè siècle."Les voies du Seigneur sont de tout évidence impénétrables!" suis-je obligé de lui répliquer, un peu honteux de ma pirouette, avant de lui proposer ce magnifique passage extrait de Dissertation sur la traite et le commerce des nègres (1764).
Ecrit par un théologien, Jean Bellon de Saint Quentin, ce petit ouvrage est un chef-d'oeuvre de cynisme chrétien. Réfutant les arguments des encyclopédistes, l'apologiste tente en effet de démontrer que l'esclavage ne contredit ni le droit naturel ni la loi Divine !
 
Voici la conclusion de cette dissertation.

 
"Traite des nègres", gravure XVIIIè
Conclusion :
Qu’il nous soit permis de terminer cette dissertation par l’importante réflexion que fait un des plus savants théologiens de notre siècle ; il en fait part à un ami dans une de ses lettres (…) Voici seulement ce que j’ai transcrit ici avec une singulière satisfaction.
Les nègres étant nécessaires à la culture de nos colonies, c’est pécher contre l’Etat et faire un très grand mal que d’en décrier le trafic comme contraire à la charité et à l’humanité, dès que ce trafic est innocent et légitime (ndlr : La preuve est établie que charité commence par soi-même !) . S’il s’y glisse des abus, il faut corriger ce qui est abusif et laisser subsister ce qui est bon. J’en dis autant de la manière dont on les traite en Amérique. En se conformant aux Ordonnances de nos rois et en usant de toute la bonté possible à l’égard des nègres, leurs maîtres n’auront rien à se reprocher.
Je suis extrêmement touché d’une raison qui me fait regarder comme un grand mal, le décrit qu’on fait de ce commerce. Le plus grand malheur qui puisse arriver à ces pauvres Africains serait la cessation de ce trafic. Ils n’auraient alors aucune ressource pour parvenir à la connaissance de la vraie religion, dont on les instruit à l’Amérique, où plusieurs se font chrétiens ; au lieu qu’en Afrique, ils sont totalement abandonnés, car je ne sache point qu’il y ait aucun missionnaire. Eh ! plût à Dieu que l’on achetât tous ces misérables nègres et qu’on en dépeuplât l’Afrique pour en peupler l’Amérique ; n’en dût-il résulter que le salut d’un seul élu, pour lequel Dieu ne fait pas difficulté quelquefois de bouleverser des royaumes entiers. On ne va pas y faire des esclaves, on les y trouve tels : en les achetant, on les fait passer d’une servitude barbare à une servitude humaine, d’autant plus avantageuse pour eux qu’elle leur devient un moyen de salut.

1794 : les prêtres de Laval montent sur l'échafaud

samedi 16 septembre 2017

L'Eglise et l'esclavage au XVIIIè siècle (2)

"Tu aimeras ton prochain comme toi-même", nous ordonne l'Evangile selon St Marc. Informé de ce commandement, un élève m'interroge sur l'attitude de l'Eglise face à la traite négrière pratiquée par la France et d'autres pays d'Europe au XVIIIè siècle."Les voies du Seigneur sont de tout évidence impénétrables!" suis-je obligé de lui répliquer, un peu honteux de ma pirouette, avant de lui proposer ce magnifique passage extrait de Dissertation sur la traite et le commerce des nègres (1764).
Ecrit par un théologien, Jean Bellon de Saint Quentin, ce petit ouvrage est un chef-d'oeuvre de cynisme chrétien. Réfutant les arguments des encyclopédistes, l'apologiste tente en effet de démontrer que l'esclavage ne contredit ni le droit naturel ni la loi Divine !
Dans ce 2nd extrait, il répond à quelques objections que lui fait un interlocuteur imaginaire. 



Mais ajoute-ton, n’est-ce pas chose qui en soi révolte les sens et répugne à la nature de vendre et de mettre à prix l’humanité ?


Ce n’est pas proprement l’humanité que l’on vend, en vendant des esclaves ; ce sont les services que ceux qui les achètent en tirent, et rien n’est plus appréciable. Ces termes « vendre » et « acheter » dont on s’offense et se choque si fort, lorsqu’il s’agit d’esclaves, sont employés dans l’Ecriture même (…)


Peut-on, sans blesser l’équité et sans se rendre coupable d’injustice envers ses semblables, leur enlever ainsi leur liberté et disposer de leur sort et de leur personne, contre leur gré et sans leur consentement ?


Nous l’avons déjà observé, en achetant des nègres en Guinée, on ne leur ôte point leur liberté, ils n’en jouissent plus, on ne les fait point esclaves, on les trouve tels. Et tout ce qui résulte de cet achat est d’améliorer leur sort ; d’où il suit que loin de leur faire injustice et de leur causer aucun tort, on les sert au contraire et on leur procure un très grand avantage, tant pour le bien-être du corps que pour le salut de l’âme, en les faisant passer à une servitude incontestablement plus douce et plus supportable que celle dont on les tire. (…)



Entre les principes de l’équité naturelle, un des premiers et le plus connu de tous n’est-il pas de ne point faire à autrui ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît ?


Cette règle est incontestable (…) Mais il n’y eut jamais de cas où il y ait moins lieu d’en faire l’application. Puisque dans la vérité du fait, on n’aggrave point le joug des esclaves nègres, et on ne leur cause aucun mal en les transférant dans nos îles. Au contraire, c’est un très grand service qu’on leur rend, et un office de charité très réel que l’on exerce à leur égard. Non seulement on adoucit de beaucoup leur servitude corporelle, mais on les met à portée d’apprendre à connaître Jésus-Christ et son Evangile.


Qu’y a-t-il donc de si avantageux pour les esclaves de Guinée, à être transférés dans nos îles, où on leur donne à peine le nécessaire, où on les fait travailler comme des chevaux, où on les maltraite et les assomme de coups ? (…)


Que l’on interroge quelqu’un de sensé et d’équitable qui ait habité dans nos colonies et ait été témoin de la conduite qu’on y tient communément envers les nègres (…) Il y a des abus, on n’en disconvient pas ; mais où n’y en a-t-il point ? Il peut s’y trouver des maîtres durs et inhumains qui en usent mal avec leurs esclaves, comme il s’en trouve parmi nous qui se montrent tels avec leurs domestiques (…) On n’exige d’eux que plusieurs heures de travail par jour (…) et les paysans occupés dans nos campagnes à cultiver la terre en font le double au moins de ce qu’on exige des nègres de nos îles.


Il n’est plus permis en France non plus que dans plusieurs autres royaumes chrétiens d’avoir des esclaves : les lois civiles en ont abrogé l’usage.


Je conviens que cela n’est plus d’usage dans notre continent et que les lois ne le permettent pas : mais la même autorité qui a établi, pour de bonnes raisons,  les lois qui le défendent parmi nous, peut bien le permettre ailleurs, lorsque le bien de l’Etat l’exige. Aussi les habitants de nos colonies sont-ils autorisés par une loi particulière du prince, à en acquérir le plus qu’ils peuvent, pour la culture des terres : ce qui devient une grande ressource de l’Etat (…) On peut lire là-dessus l’Edit du Roi du mois de mars 1724 appelé le Code Noir.


(à suivre ici)


vendredi 15 septembre 2017

L'Eglise et l'esclavage au XVIIIè siècle (1)

"Tu aimeras ton prochain comme toi-même", nous ordonne l'Evangile selon St Marc.
Informé de ce commandement, un élève m'interroge sur l'attitude de l'Eglise face à la traite négrière pratiquée par la France et d'autres pays d'Europe au XVIIIè siècle.
"
Les voies du Seigneur sont de tout évidence impénétrables !" suis-je obligé de lui répliquer, un peu honteux de ma pirouette, avant de lui proposer ce magnifique passage extrait de Dissertation sur la traite et le commerce des nègres (1764).
Ecrit par un théologien, Jean Bellon de Saint Quentin, ce petit ouvrage est un chef-d'oeuvre de cynisme chrétien. Réfutant les arguments des encyclopédistes, l'apologiste tente en effet de démontrer que l'esclavage ne contredit ni le droit naturel ni la loi Divine !
 
 



Au commencement, il est vrai, Dieu créa l’homme parfaitement libre ; c’est-à-dire pleinement maître de sa personne et de toutes ses actions, et n’étant assujetti ni comptable qu’au seul auteur de son être. En ce sens une pleine et entière liberté lui était naturelle. Mais le péché, en entrant dans le monde, a causé un étrange renversement dans son état et les choses ont bien changé de face à cet égard. Car depuis qu’abusant de sa liberté, il s’est révolté contre celui de qui il la tenait, il est honteusement déchu de cette pleine et parfaite liberté dans laquelle il avait été créé. En voulant par orgueil se soustraire à la douce et juste dépendance de son créateur et de son unique maître , il s’est précipité dans une servitude et un esclavage presque universels (….) C’est Dieu qui met des différences entre les hommes, qui diversifie leurs voies sur la terre et décide souverainement du sort de chacun d’eux, selon ses vues de justice ou de miséricorde. Ses jugements à cet égard sont pleins d’équité et toujours adorables. C’est lui qui fait le riche et le pauvre, le roi et le sujet, le libre et l’esclave (…) Or l’espèce d’esclaves dont il est question, quand on demande si le commerce des nègres que l’on tire de Guinée, est permis et légitime, sont dans ce cas. Ce sont des hommes nés esclaves, ou qui le sont devenus par une suite inévitable de guerres continuelles que leurs chefs se font entre eux. On ne les fait point esclaves en les achetant, mais on les trouve tels, retenus dans les fers, réduits à la servitude la plus cruelle et la plus intolérable, en puissance de maîtres barbares (…) Tout ce qui résulte par rapport à eux du commerce qui s’en fait, est le changement d’une servitude excessivement dure et qui les tient éloignés de tout moyen de salut, en une autre incomparablement plus douce et plus tolérable et où ils se trouvent à porté de parvenir à la connaissance de Jésus Christ et de son Evangile : d’où je conclus que l’état d’esclavage dans lequel on les retient n’est pas en soi contraire au droit naturel.(...)




Il est vrai que par notre qualité de Chrétiens nous ne formons plus qu’un seul corps en Jésus-Christ et nous devenons tous membres d’un même Chef : nous possédons la même foi, nous pratiquons le même Evangile et nous tendons au même bonheur, de quelque sexe, de quelque rang et de quelque condition que nous puissions être. Mais dans le corps, tous les membres ne tiennent pas le même range et ne sont pas destinés à la même fonction ; les pieds sont inférieurs à tous les autres, et plus près de la terre. Les frères d’une même famille n’ont pas tous les mêmes droits et les mêmes prérogatives : il y a des aînés et des cadets (…) Le but de la mission de Jésus-Christ ne fut jamais de remettre les hommes au même niveau et de les rendre tous égaux sur la terre ; il n’est point venu confondre la différence des conditions, ni détruire la juste et nécessaire subordination qu’il avait plu à la divine Providence de mettre entre elles (…) Donc le commerce que l’on fait des esclaves n’est pas en soi illégitime ni contraire aux lois du Christianisme. Il n’est pas non plus contraire à la Loi naturelle ni à la loi Divine écrite.





(à suivre ici)





dimanche 3 septembre 2017

Le Rideau levé ou l’éducation de Laure, par Mirabeau ? (4)

Figure illustre de la période révolutionnaire, le comte de Mirabeau est également l'auteur présumé de plusieurs récits libertins dont Le Rideau levé ou l'éducation de Laure, paru en 1786.
Au début du roman, Laure raconte à son amie Eugénie de quelle manière elle s'est autrefois éveillée à l'amour.
Tout commence avec le décès de sa mère, alors que la jeune fille est âgé d'une dizaine d'années. Aidée par la gouvernante Lucette, son père adoptif décide dès lors de l'initier aux secrets de l'amour. 



Ce fut dans une de ces charmantes nuits qu’il me fit goûter une nouvelle sorte de plaisir, dont je n’avais pas d’idée ; que non seulement je ne trouvai pas moins délicieux, mais encore qui me parut des plus vifs :
— Ma chère Laure, aimable enfant, tu m’as donné ta première fleur ; mais tu possèdes un autre pucelage que tu ne dois ni ne peux me refuser si je te suis toujours cher.
— Ah ! si tu me l’es ! Qu’ai-je donc en moi, cher papa, dont tu ne puisses disposer à ton gré et qui ne soit pas à toi ? Heureuse quand je puis faire tout ce qui peut contribuer à ta satisfaction, mon bonheur est établi sur elle !
— Fille divine, tu m’enchantes, la nature et l’amour ont pris plaisir à former tes grâces ; partout en toi séjourne la volupté, elle se présente avec mille attraits différents dans toutes les parties de ton corps ; dans une belle femme qu’on adore, et qui paie d’un semblable amour, mains, bouche, aisselles, tétons, cul, tout est con.
— Eh bien ! choisis, tu es le maître et je suis toute à tes désirs.
Il me fit mettre sur le côté gauche, mes fesses tournées vers lui. Et, mouillant le trou de mon cul et la tête de son vit, il l’y fit entrer doucement. La difficulté du passage levée ne nous présenta plus qu’un nouveau chemin semé de plaisirs accumulés ; et, soutenant ma jambe de son genou relevé, il me branlait, en enfonçant de temps en temps le doigt dans mon con. Ce chatouillement réuni de toutes parts avait bien plus d’énergie et d’effet ; quand il reconnut que j’étais au moment de ressentir les derniers transports, il hâta ses mouvements, que je secondais des miens. Je sentis le fond de mon cul inondé d’un foutre brûlant, qui produisit de ma part une décharge abondante. Je goûtais une volupté inexprimable, toutes les parties sensibles y concouraient, mes transports et mes élans en faisaient une démonstration convaincante ; mais je ne les devais qu’à ce vit charmant, pointu, retroussé et peu puissant, porté par un homme que j’adorais.
— Quel séduisant plaisir, chère Laurette ! et toi, belle amie, qu’en dis-tu ? Si j’en juge par celui que tu as montré, tu dois en avoir eu beaucoup !
— Ah ! cher papa, infini, nouveau, inconnu, dont je ne peux exprimer les délices, et dont les sensations voluptueuses sont multipliées au-delà de tout ce que j’ai éprouvé jusqu’à présent.

— En ce cas, ma chère enfant, je veux une autre fois y répandre plus de charmes encore, en me servant en même temps d’un godemiché, et je réaliserai par ce moyen l’Y grec du Saint-Père.
— Papa, qu’est-ce donc qu’un godemiché ?
— Tu le verras, ma Laure, mais il faut attendre un autre jour.
Le lendemain je ne lui parlai que de cela ; je voulais le voir absolument ; je le pressai tant qu’il fallut enfin qu’il me le montrât. J’en fus surprise ; je désirais qu’il m’en fît faire l’essai le soir même, mais il me remit au surlendemain. Je veux, ma chère, faire avec toi, comme papa me fit alors ; je ne t’en ferai la description que dans une autre scène où nous le mîmes en usage. Je t’en ai déjà parlé de vive voix, et je regrettais de ne pas l’avoir dans nos caresses où j’aurais avec tant de plaisir joué le rôle d’un amant tendre avec toi ; mais je ne l’oublierai sûrement pas quand j’irai retrouver ma consolation dans tes bras.
Malgré la distance qu’il mettait dans les plaisirs qu’il me procurait, il n’y avait aucune sorte de variété qu’il n’y répandît pour y ajouter de nouveaux attraits ; il m’était d’autant plus facile de les y trouver que je l’aimais avec toute la passion dont j’étais capable. Quelquefois il se mettait sur moi, sa tête entre mes cuisses et la mienne entre ses genoux ; il couvrait de sa bouche ouverte et brûlante toutes les lèvres de mon con ; il les suçait, il enfonçait sa langue entre deux, du bout il branlait mon clitoris, tandis qu’avec son doigt ou le godemiché il animait, il inondait l’intérieur. Je suçais moi-même la tête de son vit ; je la pressais de mes lèvres ; je la chatouillais de ma langue ; je l’enfonçais tout entier, je l’aurais avalé. Je caressais ses couilles, son ventre, ses cuisses et ses fesses. Tout est plaisir, charmes, délices, chère amie, quand on s’aime aussi tendrement et avec autant de passion.
Telle était la vie délicieuse et enchantée dont je jouissais depuis le départ de ma chère bonne. Déjà huit ou neuf mois s’étaient écoulés, qui m’avaient paru fuir bien rapidement.
Le souvenir et l’état de Lucette étaient les seuls nuages qui se montraient dans les beaux jours que je passais alors ; variés par mille plaisirs, suivis de nuits qui m’intéressaient encore davantage, je faisais consister toute ma satisfaction et ma félicité à les voir disparaître pour employer tous les moments qu’ils me laissaient entre les bras de ce tendre et aimable papa, que j’accablais de mes baisers et de mes caresses. Il me chérissait uniquement, mon âme était unie à la sienne, je l’aimais à un degré que je ne puis te peindre.

(à suivre)

vendredi 1 septembre 2017

Le Rideau levé ou l’éducation de Laure, par Mirabeau ? (3)




Figure illustre de la période révolutionnaire, le comte de Mirabeau est également l'auteur présumé de plusieurs récits libertins dont Le Rideau levé ou l'éducation de Laure, paru en 1786.

Au début du roman, Laure raconte à son amie Eugénie de quelle manière elle s'est autrefois éveillée à l'amour.

Tout commence avec le décès de sa mère, alors que la jeune fille est âgé d'une dizaine d'années. Aidée par la gouvernante Lucette, son père adoptif décide dès lors de l'initier aux secrets de l'amour. 



J’avançais en âge et j’atteignais la fin de ma seizième année lorsque ma situation prit une face nouvelle : les formes commençaient à se décider ; mes tétons avaient acquis du volume, j’en admirais l’arrondissement journalier, j’en faisais voir tous les jours les progrès à Lucette et à mon papa, je les leur faisais baiser, je mettais leurs mains dessus et je leur faisais faire attention qu’ils les remplissaient déjà ; enfin, je leur donnais mille marques de mon impatience. Élevée sans préjugés, je n’écoutais, je ne suivais que la voix de la nature : ce badinage l’animait et l’excitait vivement, je m’en apercevais :

— Tu bandes, cher papa, viens…

Et je le mettais entre les bras de Lucette. Je n’étais pas moins émue, mais je jouissais de leurs plaisirs. Nous vivions, elle et moi, dans l’union la plus intime ; elle me chérissait autant que je l’aimais ; je couchais ordinairement avec elle, et je n’y manquais pas, lorsque mon papa était absent. Je remplissais son rôle du mieux que je le pouvais : je l’embrassais, je suçais sa langue, ses tétons ; je baisais ses fesses, son ventre, je caressais sa jolie motte, je la branlais ; mes doigts prenaient souvent la place du vit que je ne pouvais lui fournir, et je la plongeais à mon tour dans ces agonies voluptueuses où j’étais enchantée de la voir. Mon humeur et mes manières lui avaient fait prendre pour moi une affection dont je ne puis, ma chère, te donner l’idée que d’après la tienne. Elle m’avait vue bien des fois, au milieu de nos caresses, violemment animée et, dans ces moments, elle m’assurait qu’elle désirait que je fusse au terme où elle pût aussi me procurer, sans danger, les mêmes plaisirs que je lui donnais. Elle souhaitait que mon papa me l’eût mis et eût ouvert la route sur laquelle ils sont semés :

— Oui, ma chère Laure, disait-elle, quand cet instant arrivera, je projette d’en faire une fête ; je l’attends avec empressement. Mais, ma chère amie, je crois apercevoir qu’il ne tardera pas : tes tétons naissants sont presque formés, tes membres s’arrondissent, ta motte se rebondit, elle est déjà toute couverte d’un tendre gazon, ton petit conin est d’un incarnat admirable, et j’ai cru découvrir dans tes yeux que la nature veut qu’on te mette bientôt au rang des femmes. L’année dernière, au printemps, tu vis les préludes d’une éruption qui va s’établir tout à fait.

En effet, je ne tardai pas à me sentir plus pesante, la tête chargée, les yeux moins vifs, les douleurs de reins et des sensations d’une colique extraordinaire pour moi ; enfin, huit ou dix jours après, Lucette trouva la gondole ensanglantée. Mon père ne me la remit pas. Ils avaient pressenti l’effet de ma situation ; j’en étais prévenue ; je restai près de neuf jours dans cet état, après lesquels je redevins aussi gaie et je jouis d’une santé aussi brillante qu’auparavant.

Que j’eus de joie de cet événement ! J’en étais folle, j’embrassai Lucette :

— Ma chère bonne, que je vais être heureuse !

Je volai au cou de mon papa, je le couvris de mes baisers :

— Me voilà donc enfin à l’époque où tu me désirais !…

Que je serai contente si je puis faire naître tes désirs et les satisfaire !… Mon bonheur est d’être tout entière à toi : mon amour et ma tendresse en font l’objet de ma félicité…

Il me prit dans ses bras, me mit sur ses genoux. Ah ! qu’il me rendait bien les caresses que je lui faisais ! Il pressait mes tétons, il les baisait, il suçait mes lèvres, sa langue venait caresser la mienne ; mes fesses, mon petit conin, tout était livré à ses mains brûlantes.

— Il est enfin arrivé, charmante et chère Laure, cet heureux instant où ta tendresse et la mienne vont s’unir dans le sein de la volupté ; aujourd’hui même je veux avoir ton pucelage et cueillir la fleur qui vient d’éclore ; je vais la devoir à ton amour, et ce sentiment de ton cœur y met un prix infini ; mais tu dois être prévenue que, si le plaisir doit suivre nos embrassements et nos transports, le moment qui va me rendre maître de cette charmante rose te fera sentir quelques épines qui te causeront de la douleur.

— Qu’importe, fais-moi souffrir, mets-moi toute en sang si tu veux, je ne puis te faire trop de sacrifices, ton plaisir et ta satisfaction sont l’objet de mes désirs.

Le feu brillait dans nos yeux. L’aimable Lucette, voulant coopérer à l’effusion du sang de la victime, ne montrait pas moins d’empressement que si elle-même eût été le sacrificateur. Ils m’enlevèrent et me portèrent dans un cabinet qu’ils avaient fait préparer pendant le temps de mon état. La lumière du jour en était absolument bannie ; un lit de satin gros bleu était placé dans un enfoncement entouré de glaces. Les foyers de quatre réverbères placés dans les encoignures, adoucis par des gazes bleues, venaient se réunir sur un petit coussin de satin couleur de feu, mis au milieu, qui formait la pierre sur laquelle devait se consommer le sacrifice. Lucette exposa bientôt à découvert tous les appas que j’avais reçus de la nature ; elle ne para cette victime volontaire qu’avec des rubans couleur de feu qu’elle noua au-dessus de mes coudes et à la ceinture dont, comme une autre Vénus, elle marqua ma taille. Ma tête, couronnée simplement de sa longue chevelure, n’avait d’autre ornement qu’un ruban de la même couleur qui la retenait. Je me jetai de moi-même sur l’autel.


Je souhaitais vivement le voir dans l’état où j’étais ; je l’en pressai avec instance ; il y fut bientôt. Lucette le dégagea de tous ses vêtements ; il me coucha sur le lit, mes fesses posées sur le coussin. Je tenais en main le couteau sacré qui devait à l’instant immoler mon pucelage. Ce vit que je caressais avec passion, semblable à l’aiguillon de l’abeille, était d’une raideur à me prouver qu’il percerait rigoureusement la rose qu’il avait soignée et conservée avec tant d’attention. Mon imagination brûlait de désir ; mon petit conin tout en feu appétait ce cher vit, que je mis aussitôt dans la route. Nous nous tenions embrassés, serrés, collés l’un sur l’autre ; nos bouches, nos langues se dévoraient. Je m’apercevais qu’il me ménageait ; mais passant mes jambes sur ses fesses et le pressant bien fort, je donnai un coup de cul qui le fit enfoncer jusqu’où il pouvait aller, La douleur qu’il sentit et le cri qui m’échappa furent ceux de sa victoire. Lucette, passant alors sa main entre nous, me branlait, tandis que, de l’autre, elle chatouillait le trou de mon cul. La douleur, le plaisir mélangés, le foutre et le sang qui coulaient, me firent ressentir une sublimité de plaisir et de volupté inexprimables. J’étouffais, je mourais ; mes bras, mes jambes, ma tête tombèrent de toutes parts ; je n’étais plus à force d’être. Je me délectais dans ces sensations excessives, auxquelles on peut à peine suffire. Quel état délicieux ! Bientôt, j’en fus retirée par de nouvelles caresses ; il me baisait, me suçait, me maniait les tétons, les fesses, la motte ; il relevait mes jambes en l’air pour avoir le plaisir d’examiner, sous un autre point de vue, mon cul, mon con, et le ravage qu’il y avait fait. Son vit que je tenais, ses couilles que Lucette caressait, reprirent bientôt leur fermeté. Il me le remit. Le passage facilité ne nous fit plus sentir, dès qu’il fut entré, que des ravissements. Lucette, toujours complaisante, renouvela ses chatouillements, et je retombai dans l’apathie voluptueuse que je venais d’éprouver.

Mon papa, fier de sa victoire et charmé du sacrifice que mon cœur lui avait fait, prit le coussin qui était sous moi, teint du sang qu’il avait fait couler, et le serra avec le soin et l’empressement de l’amant le plus tendre, comme un trophée de sa conquête. Il revint bientôt à nous :

— Ma Laure, chère et aimable fille, Lucette a multiplié tes plaisirs : n’est-il pas juste de les lui faire partager ?

Je me jetai à son cou, je l’attirai sur le lit ; il la prit dans ses bras et la mit à côté de moi ; je la troussai d’abord et je la trouvai toute mouillée.

— Que tu es émue, ma chère bonne, je veux te rendre une partie du plaisir que j’ai eu.

Je pris la main de mon papa, je lui introduisis un de ses doigts qu’il faisait entrer et reparaître, et je la branlai. Elle ne tarda pas à tomber dans l’extase d’où je venais de sortir.
Ah ! chère Eugénie, que ce jour eut de charmes pour moi !
 (à suivre ici)