Le décret de 1791 prévoit que le Panthéon sera "destiné à recevoir les
cendres des grands hommes, à dater de l'époque de notre liberté" et que "les exceptions qui pourront avoir lieu pour quelques grands
hommes, morts avant la Révolution, tels que Descartes, Voltaire,
Rousseau, ne puissent être faites que par l'Assemblée nationale".
le Panthéon |
Nul besoin de revenir sur le passé, d'ergoter sur le mérite présumé de ces "grands hommes" qui y sont entrés, de ceux qu'on a oubliés, de ceux enfin qui n'auraient jamais dû franchir le seuil de l'ancienne abbaye Sainte-Geneviève. Du passé, on ne parlera donc guère, sinon pour interroger l'avenir et notamment le projet soumis par J. Attali au Président Hollande de "panthéoniser" Denis Diderot en 2013.
Oh, je le sais bien, dans l'esprit de bon nombre d'entre vous, Diderot n'est autre que cet immense philosophe, fondateur de l'Encyclopédie, figure emblématique du XVIIIè siècle, et infatigable défenseur de nos libertés fondamentales face à une autorité royale et religieuse hostile au progrès des idées. A ce titre, comment lui refuserait-on l'entrée dans le Saint des Saints, alors que ses plus célèbres condisciples (Voltaire et Rousseau) y reposent depuis plus de deux siècles ?
Diderot, par P.M Alix |
D'ailleurs, le jeune Diderot, celui des années 1740-1750, annonce effectivement une personnalité d'exception et un penseur de génie. De cette période de bohème, on retiendra les premières amitiés, celles de Condillac et de Rousseau, et surtout l'adhésion au projet encyclopédique (en 1746) initié par quatre libraires parisiens et conduit jusqu'en 1747 par l'abbé Gua de Malves.
A cette époque, Diderot a déjà jeté les fondements de sa pensée dans quelques ouvrages : ainsi, dans les Pensées philosophiques (ouvrage publié anonymement en 1746), le philosophe envisage une morale qui se passerait de religion. Le matérialisme de Diderot proposera bientôt une explication de l'homme liée au seul jeu des lois physiques et excluant tout recours à l'âme ou même à Dieu...
Passionné par les sciences, il s'adonne notamment à la mécanique et à la géométrie, et publie dans le même temps plusieurs mémoires visant à lui ouvrir les portes de l'Académie des Sciences et à lui conférer une certaine respectabilité.
Car depuis 1747, Diderot a été choisi (en compagnie de d'Alembert) pour prendre la direction de l'Encyclopédie. Mal payé (on prévoit alors 1200 livres après l'impression du 1er volume, puis 6000 livres supplémentaires à raison de 144 livres par mois jusqu'à la fin du paiement), il prend pourtant le projet à bras le corps. Ignoré du grand public (contrairement à d'Alembert), Diderot entreprend, quasiment seul, l'immense travail éditorial auquel il va consacrer près de vingt ans de sa vie.
A mes yeux, s'il faut célébrer un Diderot, il est préférable de s'en tenir là et de taire les trente années qui vont suivre. Car la 1ère trahison de l'encyclopédiste survient en 1749, alors qu'il vient d'être emprisonné à Vincennes pour sa Lettre sur les aveugles. ( à suivre)
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