« Ô guerre sublime ! Guerre pacifique pour fonder la paix universelle ! Ô le grand cœur de la France ! Quelle tendresse pour le monde ! Quelle ardeur de sacrifice ! Et comme tous les biens de la terre pesaient peu en ce moment ! » Vous avez déjà reconnu Michelet, en proie à l'une de ses plus remarquables performances dans l'exaltation et le dithyrambe. Il s'agit de la guerre dont l'Assemblée législative vota la décision, le 20 avril 1792. (...). Mais sans doute convient-il de regarder attentivement comment les choses se sont passées pour aboutir à cette déclaration de guerre, inauguration d'un conflit armé qui dévastera l'Europe et durera vingt-trois ans pour ne s'achever, en fait, qu'au printemps de 1815, à Waterloo.
gravure populaire : le clergé exproprié |
Louis-Marie de Narbonne |
L'issue de ces difficultés pécuniaires trop vite reparues, c'est la guerre à l'Autriche ; et le prétexte est tout trouvé !
Léopold et Frédéric-Guillaume |
Néanmoins, pour qui, en France, veut la guerre, la déclaration de Pillnitz est utilisable. Il suffit de travestir en menace ce dont on connaît, sans erreur, l'insubstance. Par ailleurs, ces dangereux émigrés, où sont-ils ? Chez l'Électeur de Trèves, lequel a Léopold pour suzerain. Il y a donc moyen d'impliquer l'Autriche dans un complot militaire ourdi contre la France. L'opinion, bien dirigée, est favorable à une guerre dont on ne met pas en doute, chez Narbonne comme chez La Fayette, chez Mme de Staël comme chez Manon Roland, qu'elle sera victorieuse et forcera le roi à filer doux soit pour ce bicamérisme que préconisent les anglophiles, soit pour la suppression du veto, entrave à la liberté. D'aucuns fabulent, plus ou moins sincèrement, sur l'honneur de la France insulté par l'Électeur de Trèves ou sur le devoir qui incombe à tous les amis du progrès, d'écarter l'égoïsme, de répandre partout les idées nouvelles qui font la gloire de la France. Derrière ces logorrhées, les réalistes à la Narbonne savourent déjà les razzias qui ranimeront un Trésor exsangue. Quelqu'un cependant, à peu près seul de cet avis, Robespierre, s'oppose, autant qu'il est en lui, et de tous ses efforts, à la guerre. Et il invoque le bon sens. Vous attendez la victoire ? Avec quoi ? La moitié au moins des officiers n'est plus là ; ils ont déserté, émigré ; une armée sans cadres n'est plus une armée. Gare à de cruels mécomptes !
Brissot, chef de file des Girondins |
Note-"Déclaration signée en commun par l'empereur et le roi de
Prusse, le 27 août 1791.
Sa Majesté l'empereur et Sa Majesté le roi de Prusse, ayant
entendu les désirs et représentations de Monsieur et de M. le comte
d'Artois, se déclarent conjointement qu'elles regardent la situation où
se trouve actuellement le roi de France comme un objet d'un intérêt commun
à tous les souverains de l'Europe. Elles espèrent que cet intérêt ne peut
manquer d'être reconnu par les puissances dont le secours est réclamé,
et qu 'en conséquence elles ne refuseront pas d'employer, conjointement
avec Leursdites majestés, les moyens les plus efficaces, relativement
à leurs forces, pour mettre le roi de France en état d'affermir, dans
la plus parfaite liberté, les bases d'un gouvernement monarchique également
convenable aux droits des souverains et au bien-être de la nation française.
Alors, et dans ce cas, Leursdites Majestés, l'empereur et le roi de Prusse,
sont résolus d'agir promptement, d'un mutuel accord, avec les forces nécessaires
pour obtenir le but proposé et commun. En attendant elles donneront à
leurs troupes les ordres convenables pour qu'elles soient à portée de
se mettre en activité.
Signé LÉOPOLD et FRÉDÉRIC-GUILLAUME."
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