Le travailler plus pour gagner plus, énoncé par les Encyclopédistes.
Savoureux...
Fêtes des Chrétiens, (Hist. ecclés.) Les fêtes prises en général et dans leur institution, sont proprement des jours de réjouissance établis dans les premiers temps pour honorer les princes et les héros, ou pour remercier les dieux de quelque événement favorable. Telles étaient les fêtes chez les peuples policés du paganisme, et telle est à peu près l’origine des fêtes parmi les Chrétiens : avec cette différence néanmoins, que, dans l’institution de nos fêtes, les pasteurs ont eu principalement en vue le bien de la religion et le maintien de la piété. (…)
Les fêtes, qui n’étaient pas d’abord en
grand nombre, se multiplièrent dans la suite à l’excès ; à la fin tout le
monde en a senti l’abus. Ce fut l’un des premiers objets de réforme parmi les
Protestants.(…)
On n’a pas démontré de même, quant à l’intérêt national, à
quel point le public était lésé dans la cessation des travaux, prescrite aux
jours de fêtes. C’est là néanmoins
une discussion des plus intéressantes ; et c’est à quoi cet article est
principalement destiné.
Les biens physiques et réels, je veux dire les fruits de la
terre et toutes les productions sensibles de la nature et de l’art, en un mot
les biens nécessaires pour notre subsistance et notre entretien, ne se produisent
point d’eux-mêmes, surtout dans ces climats ; la providence les a comme
attachés et même proportionnés au travail effectif des hommes. Il est visible
que si nous travaillons davantage, nous augmenterons par cela même la quantité
de nos biens ; et cette augmentation sera plus sensible encore, si nous
faisons beaucoup moins de dépense. Or je trouve qu’en diminuant le nombre des fêtes, on remplirait tout à la fois ces
deux objets ; puisque multipliant par-là les jours ouvrables, et par
conséquent les produits ordinaires du travail, on multiplierait à proportion
toutes les espèces de biens, et de plus on sauverait des dépenses
considérables, qui sont une suite naturelle de nos fêtes ; sur quoi je fais les observations suivantes.
On compte environ trente-sept fêtes à Paris, mais il y en a beaucoup moins en plusieurs
provinces. Après une suppression qui s’est faite dans quelques diocèses, il s’y
en trouve encore vingt-quatre : partons de ce point-là, et supposons
vingt-quatre fêtes actuellement chômées
dans tout le royaume. Maintenant je suppose qu’on ne réserve que le lundi de
Pâque, l’Ascension, la Notre-Dame d’Août, la Toussaint, et le jour de Noël, je
suppose ; dis-je, qu’on laisse ces cinq fêtes telles à peu près qu’elles sont à présent, et qu’on
transporte les autres au dimanche. (…)
Au surplus, il est certain qu’en considérant les abus
inséparables des fêtes, la transposition
que je propose est à désirer pour le bien de la religion ; attendu que ces
saints jours consacrés par l’Eglise à la piété, deviennent dans la pratique des
occasions de crapule et de libertinage, souvent même de batteries et de
meurtres (…)
le cabaret de la Courtille au XVIIIè siècle |
Supposant comme on a dit, vingt-quatre fêtes pour tout le royaume, et les chômant désormais le dimanche, à
l’exception des cinq des plus solennelles, c’est dix-neuf fêtes épargnées en faveur de nos travaux ; cependant comme il
en tombe toujours quelques-unes au dimanche, ce qui les diminue d’autant, ne
comptons que sur seize journées acquises par la transposition des fêtes.
Nous pouvons évaluer les journées pour hommes et pour
femmes dans les campagnes éloignées à six sous prix commun pour toutes les
saisons, et c’est mettre les choses fort au-dessous du vrai. Mais, la bonne
moitié de nos travailleurs, je veux dire tous ceux qui sont employés dans les
villes considérables & dans les campagnes qui en sont voisines, tous
ceux-là, dis-je, gagnent au moins du fort au faible quatorze sous par jour.
Mettons donc quatorze sous pour la plus forte journée, et six sous pour la plus
faible, c’est-à-dire dix sous pour la journée commune.
Nous pouvons mettre au moins cinq sous de perte réelle pour
un travailleur, en ce qu’il dépense de plus aux jours de fêtes, pour la parure, pour la bonne chère et la boisson ;
article important, et qui pourrait être porté plus haut, puisqu’une fête outre la perte et les dépenses du
jour, entraîne bien souvent son lendemain. Voilà donc du plus au moins à toute fête quinze sous de vraie perte pour
chaque travailleur ; or quinze sous multipliés par seize fêtes qu’on suppose transportées au
dimanche, font pour lui une perte actuelle de douze francs toutes les années.
(…)
Maintenant sur
dix-huit à vingt millions d’âmes que l’on compte dans le royaume, supposons
huit millions de travailleurs, y compris les artisans, manufacturiers,
laboureurs, vignerons, voituriers, marchands, praticiens, gens d’affaires, etc. y compris encore un grand nombre de
femmes tant marchandes qu’ouvrières, qui toutes perdent aux fêtes à peu près comme les hommes. Or
s’il y a huit millions de travailleurs en France à qui l’on puisse procurer de
plus tous les ans seize jours de travail et d’épargne, à quinze sous par jour,
ou comme on a vu à douze francs par année, c’est tout d’un coup
quatre-vingt-seize millions de livres que les fêtes nous enlèvent, & que nous gagnerions annuellement si l’on
exécutait ce que je propose.(...)
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