samedi 18 décembre 2010

Les Confessions (4) : Jean-Jacques chez Ducommun

C'est faire fausse route que de chercher les failles de Jean-Jacques dans son enfance. A fortiori, lorsque c'est lui-même qui la raconte dans les Confessions.
A mon sens, tout le personnage de Rousseau (mais aussi ses écrits) s'explique par cette journée décisive de 1749, lorsqu'il rend visite à Diderot en prison de Vincennes et qu'il décide d'écrire son Discours sur les Sciences et les Arts (voir articles de septembre). Le 2nd Discours (celui sur l'Inégalité) ne sera qu'un prolongement de cette première diatribe contre la société policée de Lumières.
Rousseau sera raillé pour ces propos ; ses amis les plus proches (Diderot, Grimm) l'accuseront d'ailleurs publiquement d'hypocrisie et de tartufferie, de jouer le rôle d'un Diogène du XVIIIème siècle. Comme le dira Grimm dans sa Correspondance Littéraire, "le rôle de la singularité réussit toujours à qui a le courage et la patience de le jouer.
Rousseau consacrera près de 20 ans et plusieurs oeuvres à prouver son authenticité.
Prenons l'exemple de son apprentissage chez le graveur Ducommun, raconté au livre I des Confessions. La "tyrannie" de ce jeune maître va très rapidement corrompre la bonté originelle du jeune Jean-Jacques. Il se définit lui-même comme un "enfant perdu" qui apprend "à convoiter en silence", "à dissimuler", "à dérober enfin". "Je ne voyais qu'objets de jouissances pour d'autres et de privations pour moi seul", précise-t-il pour expliquer sa métamorphose. D'un coup d'un seul, il vient d'illustrer la thèse de son Discours sur l'Inégalité. C'est la propriété, l'injustice, et l'inégalité sociale qui sont cause de tous nos maux. D'ailleurs, sa vie en est l'exemple même ! Pour souligner son propos, il ajoute quelques lignes plus bas : "La convoitise et l'impuissance mènent toujours là. Voilà pourquoi tous les laquais sont fripons..."
Toujours ce lien de causalité, omniprésent dans les 6 premiers livres des Confessions
Voici quelle fut ma vie, voici ce que cela prouve... 
Et si on inverse la démarche : voici ce que j'affirme ; voici quelle fut ma vie. Voyez à quel point elle illustre la vérité de mes thèses...

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