En 1909, l'Anglaise Frédérika Mc Donald fut la première à dépouiller les manuscrits originaux de l'Histoire de Madame de Montbrillant, roman autobiographique écrit par Louise d'Epinay à partir de 1756.
Recoupant les cahiers conservés aux
Archives nationales avec ceux déposés à la bibliothèque de l'Arsenal,
elle révéla le complot ourdi par les proches de Mme d'Epinay pour perdre
la réputation de Rousseau.
Les lignes qui suivent sont extraites de La légende de Jean-Jacques Rousseau, ouvrage de F. Mc Donald paru en 1909.
Quels étaient donc les véritables
auteurs de ces Notes ? On peut le deviner facilement, d’après le but
qu’elles révèlent. Ce but n’est pas de glorifier Mme d’Epinay sous les traits
de Mme de Montbrillant, ni de la disculper des accusations de trahison formulées
contre elle par Rousseau dans les Confessions. Ce but est de glorifier Grimm et
Diderot sous les noms de Volx et Garnier, de renouveler contre Rousseau les
mêmes diffamations répandues par la Correspondance Littéraire et rapportées
secrètement dans les Tablettes de Diderot (….) En tranchant ainsi la question,
nous ne nous appuyons pas seulement sur des arguments, mais sur des preuves
évidentes, positives. Dans les Notes écrites par Mme d’Epinay l’on trouve
consignées des additions et des altérations aux instructions originales, et ces
altérations sont de l’écriture de Diderot ! (…)
Il nous reste à résumer ce que la
découverte et l’étude comparée de ces manuscrits apportent de nouveau pour
l’étude critique de la personnalité de Jean-Jacques.
Et tout d’abord en ce qui
concerne les Mémoires de Mme d’Epinay ; il est prouvé que cet ouvrage –
accepté par la critique actuelle comme fournissant le récit fait par Mme
d’Epinay de la querelle de Rousseau et de ses anciens amis, et comme apportant
le témoignage à opposer aux déclarations de l’auteur des Confessions – ne
renferme pas l’histoire originale de Mme d’Epinay. Le manuscrit de l’Arsenal et
des Archives montre que le roman original fut « récrit dès le
commencement », conformément à un plan dicté à Mme d’Epinay par Grimm et
Diderot. (…) En d’autres termes, toute l’argumentation tirée de la prétendue
concordance entre les relations de la conduite de Rousseau par Mme d’Epinay
d’une part et les Encyclopédistes de l’autre, ne tient pas debout ; il est
prouvé que tous les jugements basés sur la croyance et la véracité essentielle
des Mémoires ne s’appuient que sur des fondements faux.
Pour ce qui regarde, d’autre
part, la conspiration contre Rousseau, il est prouvé que cette conspiration
exista.
Les différents manuscrits de
l’ouvrage posthume de Mme d’Epinay et l’histoire de ces documents nous aident à
découvrir l’instrument soigneusement ajusté par les conspirateurs pour
transmettre à la postérité leur portrait faux de l’homme qu’ils détestaient.
Ici également l’argumentation,
réfutée par l’évidence qui résulte de ces documents, n’a plus ni valeur, ni
raison d’être. Il n’est plus permis, en présence de cette évidence de regarder
comme « extravagante » ou « improbable » l’idée que des
hommes, dans la position de Grimm et de Diderot, auraient eu l’intention
maligne ou auraient pris la peine de conspirer délibérément contre Rousseau,
dans le but de lui édifier une réputation entièrement fausse.
Il est prouvé au contraire qu’ils
eurent cette malignité et qu’ils prirent cette peine.
Tout ceci établi, la question
n’est plus de discuter si l’hypothèse d’un complot est vraisemblable ou, au
contraire, absurde. Mais il s’agit d’examiner les instruments dont les
conspirateurs se sont servis, l’usage qu’ils en ont fait et le plan qu’ils ont
suivi.
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