A l'inverse des grands mouvements dissidents (chinois, soviétique et autres) du passé, l'actuelle dissidence française vit au grand jour, en toute liberté, et en se servant du média devenu dominant (le net) pour exposer ses vues.
Si les situations diffèrent, la rhétorique n'a quant à elle guère changé : on se dit toujours frappé par la censure, victime d'un affreux complot médiatique qui vous bâillonne, on se voudrait persécuté, on rêve d'être arrêté ( une courte peine de prison : le Graal de nos pseudo-dissidents !) voire agressé...
souvenez-vous... |
Bien sûr, on se prétend détenteur d'une vérité, de LA vérité !
Bien sûr, le SYSTEME (notez l'idée d'organisation, de concertation) veut vous empêcher de la révéler...
En période de crise (économique, sociale, morale, politique...), bon nombre de déclassés, d'oubliés et de malheureux viennent grossir les rangs de cette dissidence 2.0, en quête d'un discours idéologique et culturel qui alimente leur ressentiment. Il existe donc un marché de la dissidence, plutôt florissant d'ailleurs, dont les ramifications s'étendent sur le net, et qui propose une vision simpliste, souvent binaire (entendez : le bien et le mal), de notre monde.
On y trouve toutes sortes d'acteurs, des convaincus, des négationnistes, des brillants, des illuminés, des opportunistes, souvent anti-républicains et anti-laïcards, et qui s'inscrivent dans ce schéma manichéen pour réécrire notre histoire.
Marion Sigaut |
L'intervention de Marion Sigaut (merci à M.T de me l'avoir signalée) illustre parfaitement ce propos. Evoquant l'affaire Voltaire-de Rohan (voir ici à partir de la 7è minute), l'historienne parle de la "vengeance" qu'aurait réclamée le poète après avoir subi la bastonnade. "Un prêté pour un rendu", avance-t-elle pour justifier le comportement de l'"homme de guerre" (sur ce dernier point aussi, il y aurait à redire) qu'était de Rohan. "Il n'avait qu'à présenter des excuses" conclut benoîtement la pasionaria des anti-Lumières...
Guy-Auguste de Rohan |
Etrange lecture de l'histoire... On ne reviendra pas sur le déroulement de la querelle (on l'a déjà fait ici), ni sur les inexactitudes de ce compte rendu. Pour le coup, on se contentera de rappeler à l'historienne-dissidente que Voltaire n'a jamais exigé de "vengeance" de qui que ce soit, mais simplement qu'on lui rende justice. Cette justice qui, soixante ans plus tard, allait imposer à tous les Rohan du royaume que les citoyens seraient désormais "libres et égaux en droits". Car si ce jour-là le poète n'a pu faire valoir ses droits, c'est qu'en 1726, la parole d'un roturier ne pesait rien face à celle d'un aristocrate. Les ricanements de Marion Sigaut donnent à croire qu'elle cautionne cet état de fait. On ne s'en étonnera pas...
Dans sa grille de lecture, Voltaire sera toujours du côté du mal, et les Rohan du côté du bien. Toujours...
L'histoire de France réduite au noir et blanc, à une lecture binaire qui en gomme toutes les aspérités...
Non, décidément, jamais Marion Sigaut ne se hasardera dans les nuances de gris.
Dans sa grille de lecture, Voltaire sera toujours du côté du mal, et les Rohan du côté du bien. Toujours...
L'histoire de France réduite au noir et blanc, à une lecture binaire qui en gomme toutes les aspérités...
Non, décidément, jamais Marion Sigaut ne se hasardera dans les nuances de gris.
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